TRAITÉS
SUR L’ÉVANGILE DE SAINT JEAN
SUR
CE TEXTE DE JEAN : « AU COMMENCEMENT ÉTAIT LE VERDE ET LE VERRE
ÉTAIT EN DIEU »,
JUSQU’A CES MOTS : « ET LES TÉNÈBRES NE L’ONT POINT COMPRISE ».
(Jn. I, 4-5.)
Pareil à une montagne
qui s’élève jusqu’au ciel, Jean va y puiser la connaissance des
mystères supérieurs à l’esprit humain; puissions-nous, en le
suivant, arriver au même but! Le Verbe est la parole de Dieu, parole
intérieure, immatérielle, éternelle; par qui toutes choses ont été
faites; il est l’archétype, le principe vivifiant de toutes les
créatures, et, en particulier, la lumière de l’homme.
1. Quand, d’une part,
je considère ce que nous venons d’entendre de la leçon de l’Apôtre,
à savoir que l’homme animal ne perçoit point les choses qui sont de
l’esprit de Dieu
quand je remarque, d’autre part, que, dans cette multitude formée
par votre charité, il s’en trouve nécessairement plusieurs, que
conduit encore la sagesse de la chair, et qui sont incapables de
s’élever jusqu’à l’intelligence des choses spirituelles, non
hésitation est grande, et je ne sais comment, avec la grâce de Dieu,
j’expliquerai et développerai, selon mes faibles moyens, ce qui a
été lu de l’Évangile: « Au commencement était le Verbe, et le Verbe
était en Dieu, et le Verbe était Dieu ». Cette parole, en effet,
l’homme animal ne la comprend pas. Hé quoi! mes frères? Est-ce pour
nous un motif de garder le silence? Pourquoi lire, s’il faut se
taire ensuite? A quoi bon écouter ce que personne n’explique? Et
pourquoi expliquer, si l’on n’est pas compris? Mais comme, d’un
autre côté, je ne puis douter qu’il n’y en ait parmi vous
quelques-uns, non seulement pour comprendre mes explications, mais
même pour les deviner d’avance, je ne frustrerai pas ceux qui ont
l’intelligence, par la crainte d’adresser des paroles
incompréhensibles, et par conséquent inutiles à ceux auxquels elle
manque. La miséricorde divine viendra peut-être, d’ailleurs, donner
satisfaction à tous, et accorder à chacun la grâce de comprendre
comme il peut, parce que celui-là même qui parle dit aussi ce qu’il
peut. Car, qui pourrait dire ce qu’est le Verbe? Je me hasarderai à
le dire, mes frères peut-être Jean lui même n’a-t-il pas dit ce
qu’il est, et s’est-il borné à en parler de son mieux, puisqu’il
n’était qu’un homme et qu’il parlait de Dieu? Il était, à la vérité,
inspiré d’en haut; mais, en définitive, il était homme; parce qu’il
était inspiré, il a parlé; s’il ne l’avait pas été, il n’aurait rien
dit, parce qu’il était inspiré, mais homme, il n’a pas dit tout ce
qui est; mais ce que l’homme peut dire, il l’a dit.
2. Aussi bien, mes très
chers frères, Jean était une de ces montagnes dont il est écrit que
« les montagnes reçoivent la paix pour le peuple et les collines la
justice »
.
Les montagnes sont les âmes élevées; les collines, les âmes
communes. Mais si les montagnes reçoivent la paix, c’est afin que
les collines puissent recevoir la justice. Quelle est cette justice
que reçoivent les collines? C’est la foi; car « c’est de la foi que
vit le juste »
.
Or, les âmes du commun ne recevraient pas la foi, si les âmes
d’élite appelées montagnes n’étaient éclairées par la Sagesse
elle-même, et rendues capables de transmettre aux plus faibles ce
que celles-ci sont capables de recevoir, les collines vivant de la
foi, parce que les montagnes reçoivent la paix. Par ces montagnes il
a été dit à l’Église: Que la paix soit avec vous; et en annonçant
cette paix à l’Église, ces montagnes ne se sont pas séparées de
celui qui la leur avait donnée
;
car alors elles annonceraient, non une paix véritable, mais une
fausse paix.
3. Car il se rencontre
aussi d’autres montagnes fertiles en naufrages, contre lesquelles se
brise l’esquif de celui qui va s’y butter lorsque les nautoniers en
péril aperçoivent la terre, il leur est facile de chercher à s’en
approcher; mais cette montagne, qui leur semble être de la terre, ne
recèle souvent, sous ses dehors trompeurs, que des rochers
dangereux, et quiconque vient y aborder, se brise infailliblement
contre les récifs dont elle se trouve hérissée; au lieu d’y
rencontrer le salut, on n’y rencontre que la mort. De même certains
hommes ont été d’es montagnes, et ont paru grands parmi leurs
semblables; et ils ont fait des hérésies et des schismes, et ils ont
divisé l’Église de Dieu. Mais ceux qui ont divisé l’Église de Dieu
n’étaient pas les montagnes dont il est dit « Que les montagnes
reçoivent la paix pour votre peuple ». Comment, en effet, auraient
pu recevoir la paix, ceux qui ont divisé l’unité?
4. Pour ceux qui ont
reçu la paix afin de l’annoncer au peuple, ils ont contemplé la
Sagesse elle-même, autant que l’esprit de l’homme peut contempler ce
que l’œil « n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui
n’est pas monté au cœur de l’homme »
.
Si cette Sagesse n’est pas montée au coeur de l’homme, comment
est-elle montée au cœur de Jean? Jean n’était-il pas un homme? Ou
bien, si elle n’était pas montée au coeur de Jean, le coeur de Jean
n’était-il pas monté vers elle? Car ce qui monte au coeur de l’homme
part d’en bas et s’élève vers l’homme; mais ce vers quoi monte
l’homme, est au-dessus de lui. Ainsi, mes frères, on peut dire que
la Sagesse est montée au coeur de Jean; elle y est montée, si nous
pouvons nous exprimer ainsi, en proportion de son élévation
au-dessus de la nature humaine. Qu’est-ce ceci? Jean n’était-il pas
homme? Il avait cessé de l’être dans la mesure de sa participation à
la nature des anges; car tous les saints sont des anges, vu qu’ils
annoncent Dieu. Aussi, que dit l’Apôtre aux hommes charnels et
animaux, incapables de percevoir ce qui est de Dieu? « Lorsque vous
dites: Moi je suis de Paul, moi d’Apollo, n’êtes-vous pas hommes? »
Que voulait-il donc faire d’eux en leur reprochant d’être des
hommes? Voulez-vous savoir ce qu’il en voulait faire? Écoutez le
Psalmiste: « J’ai dit: Vous tous, vous êtes des dieux, vous êtes les
fils du Très-Haut »
.
Dieu nous appelle, afin que nous ne soyons plus des hommes. En
effet, nous serons d’autant moins des hommes que nous nous
reconnaîtrons comme tels; en d’autres termes, pour arriver à cette
hauteur, il nous faut prendre l’humilité pour point de départ, de
peur que, pensant être quelque chose tandis que nous ne sommes rien,
non seulement nous ne recevions pas ce que nous ne sommes point,
mais aussi que nous ne perdions ce que nous sommes déjà.
5. Donc, mes frères, du
nombre de ces montagnes était Jean qui a dit: « Au commencement
était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu ».
Cette montagne avait reçu la paix, elle contemplait la divinité du
Verbe. Quelle montagne était Jean? Qu’il était élevé? Il s’était
élevé au-dessus de tous les monts, au-dessus de toutes les plaines
de l’air, au-dessus de toutes les hauteurs des astres, au-dessus de
tous les choeurs et des légions des auges. En effet, si Jean n’était
monté par-delà toutes les choses créées, il ne serait pas parvenu à
celui par qui ont été faites toutes les choses. Vous ne pouvez
imaginer au-delà de quoi il s’était élevé, si vous ne considérez le
but qu’il a atteint. Parles-tu du ciel et de la terre? Ce sont des
créatures. Parles-tu de ce qui est au ciel et en la terre? A plus
forte raison est-ce aussi l’ouvrage du Créateur. Parles-tu des
créatures spirituelles, des anges, des archanges, des trônes, des
dominations, des vertus, des principautés? Elles aussi, elles ont
été faites. Après avoir énuméré tous ces êtres, le Psalmiste conclut
ainsi: « Il a dit, et elles ont été faites; il a ordonné, et elles
ont été créées »
.
S’il a dit et elles ont été faites, c’est par le Verbe qu’elles ont
été faites. Or, si elles ont été faites par le Verbe, le coeur de
Jean n’est pas parvenu à ce qu’il annonce: «Au commencement était le
Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu », à moins
de s’être préalablement élevé au-dessus de ce qui a été fait par le
Verbe. Encore une fois, quelle montagne était Jean! Qu’il était
saint! Qu’il était élevé au-dessus des autres montagnes qui ont reçu
la paix pour le peuple de Dieu, afin que les collines pussent
recevoir la justice!
6. Prenez-y garde, mes
frères, Jean lui-même n’est peut-être pas du nombre de ces montagnes
dont nous avons chanté tout à l’heure: « J’ai levé les yeux vers les
montagnes d’où me viendra le secours ». Si vous le voulez savoir,
levez les yeux vers cette montagne, je veux dire, élevez-vous
jusqu’à l’Évangéliste; élevez-vous jusqu’à la hauteur de sa pensée.
Mais parce que ces montagnes reçoivent la paix, et que la paix n’est
pas possible à qui place son espérance en l’homme, n’élevez pas vos
yeux vers la montagne, en ce sens que vous pensiez pouvoir mettre en
l’homme votre espérance, et dites: « J’ai levé les yeux aux
montagnes d’où me viendra le secours », de manière à ajouter
aussitôt: « Mon secours vient du Seigneur qui a fait le ciel et la
terre »
.
Aussi, levons les yeux vers les montagnes d’où nous viendra le
secours et cependant ce n’est pas daims les montagnes que notre
espérance doit être placée; elles-mêmes, en effet, reçoivent ce
qu’elles nous donnent; par conséquent, il nous faut porter notre
espérance à l’endroit d’où le secours vient aux montagnes. Dès lors
que nous le-vous les yeux vers les Écritures parce que les hommes
nous les ont transmises, nous levons les yeux aux montagnes d’où
nous viendra le secours. Ceux qui ont écrit les livres saints
étaient des hommes qui ne brillaient pas d’un éclat qui leur fût
propre; mais celui-là était leur lumière véritable
,
qui illumine tout homme venant en ce monde. Jean-Baptiste, qui a
dit: « Je ne suis pas le Christ »
était aussi une montagne; il craignait que quelqu’un plaçant son
espérance en la montagne, ne s’écartât de celui par qui les
montagnes sont éclairées; aussi confesse-t-il lui-même que « nous
avons tous reçu de sa plénitude ». Ainsi dois-tu dire: « J’ai levé
les yeux aux montagnes d’où me viendra le secours », afin que ce
secours qui te vient, tu ne l’imputes pas aux montagnes, mais que tu
ajoutes ce qui suit « Mon secours est du Seigneur qui a fait le ciel
et la terre ».
7. Mes frères, lorsque
vous avez dressé vos coeurs vers les Écritures, au moment où
retentissaient à vos oreilles ces paroles du saint Évangile: « Au
commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe
était Dieu »
,
comme aussi les autres qui ont été lues, j’ai voulu vous faire
comprendre que vous avez levé les yeux aux montagnes. Car, si les
montagnes ne vous disaient cela, il vous serait impossible d’en
avoir la moindre idée. Des montagnes vous est venu le secours, même
pour que vous puissiez l’entendre; mais vous n’êtes pas encore
capables de comprendre ce que vous avez entendu. Demandez le secours
du Dieu qui a fait le ciel et la terre. Car, si les montagnes ont pu
vous parler, elles n’ont pas pu vous éclairer; puisqu’elles ont été
elles-mêmes illuminées par ce qu’elles ont entendu. C’est à cette
source, nies frères, que Jean a puisé ces paroles avant de les
prononcer; il a reposé sur la poitrine du Seigneurs, et il a bu ce
qu’il devait nous communiquer à son tour. Mais ce qu’il nous a
donné, ce sont les paroles; car pour l’intelligence, tu dois aller
la chercher à la source où il a puisé lui-même avant de te
désaltérer. Tu dois donc lever les yeux vers les montagnes d’où te
viendra le secours, afin de recevoir d’elles ton breuvage,
c’est-à-dire l’effusion de la parole; et aussi parce que ton secours
vient du Seigneur qui a fait le ciel et la terre, afin de remplir
ton coeur là où Jean a rempli le sien; c’est pourquoi tu as dit:
« Mon secours vient du Seigneur qui a fait le ciel et la terre »
.
Que celui donc qui le peut, remplisse son coeur, mes Frères, je le
répète; que chacun élève son coeur autant qu’il peut le faire, et
qu’il reçoive ce dont il s’agit. Mais,
direz-vous peut-être que je vous suis plus présent que Dieu? Loin de
vous une telle pensée Dieu vous est beaucoup plus présent; cas-, si
j’apparais à vos regards, il gouverne vos consciences, A moi vos
oreilles, à lui votre coeur, afin que tout se remplisse. Vous
dirigez vers nous vos yeux et les sens de votre corps; mais non, ce
n’est pas vers nous, car nous ne sommes pas une de ces montagnes
dignes d’être regardées; mais c’est vers l’Évangile, vers
l’Évangéliste lui-même; pour votre coeur, élevez-le vers le Seigneur
afin qu’il le remplisse. Que chacun l’élève de manière à savoir ce
qu’il élève, vers quoi il l’élève. Qu’ai-je dit? Ce qu’il élève et
vers quoi il l’élève? Qu’il considère quel cœur il élève; car il
l’élève vers le Seigneur, et il doit prendre garde qu’alourdi parle
poids des voluptés charnelles, ce cœur ne tombe avant même d’avoir
été soulevé. Mais chacun se voit-il chargé du fardeau de sa chair?
Que du moins il s’applique à purifier par la continence ce qu’il
élève vers Dieu. Bienheureux, en effet, ceux qui ont le cœur pur,
parce qu’ils verront Dieu
.
8. Aussi bien, à quoi bon avoir proféré
ces paroles: « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en
Dieu, et le Verbe était Dieu? » Nous aussi, nous en avons proféré au
moment où nous parlions. La parole qui est en Dieu, leur
ressemblerait-elle? Nos paroles n’ont-elles pas retenti pour
s’évanouir ensuite? La parole de Dieu résonne-t-elle de même, et
disparaît-elle aussi? Comment alors toutes choses ont-elles été
faites par elle, et rien n’a-t-il été fait sans elle? Comment
gouverne-t-elle ce qu’elle a créé, si elle est un bruit qui a
résonné et qui a passé ensuite? Quelle est donc cette parole qui se
dit et ne passe pas? Que votre charité soit attentive, le sujet le
mérite par son importance. Nous par. Ions tous les jours, et nos
paroles perdent leur valeur; en effet, elles font un peu de bruit,
puis elles disparaissent, et, à cause de cela, on y attache peu de
prix, et on ne les considère que comme des paroles. Or, il y a dans
l’homme une parole qui demeure à l’intérieur; car, pour le son, il
sort de la bouche pour se produire au dehors. Il est une parole
véritablement prononcée par l’esprit, dont la parole matérielle te
donne une idée, mais qui n’est pas le son lui-même. Quand je dis
Dieu, je profère une parole. Qu’elle est courte cette parole! Quatre
lettres et deux syllabes! Quatre lettres et deux syllabes, est-ce là
Dieu tout enlier? Ne voyez-vous pas qu’autant cette parole est peu
de chose en elle-même, autant est digne d’amour ce qu’elle signifie?
Que s’est-il passé dans ton coeur lorsque tu as entendu le mot:
Dieu? Que s’est-il passé dans le mien lorsque je disais: Dieu? Une
grande et souveraine substance est devenue le sujet de ma pensée,
substance élevée au-dessus de toute créature muable, charnelle et
animale. Et si je te demande: Dieu est-il muable ou immuable? tu me
répondras aussitôt: Loin de moi de croire ou de soupçonner quelque
mutabilité en Dieu: Dieu est immuable. Ton âme est petite, elle est
peut-être encore charnelle, par conséquent elle n’a rien pu me
répondre au sujet de Dieu, sinon qu’il est immuable, Comment donc
ton intelligence a-t-elle été capable de porter ses regards sur un
être supérieur à toutes les créatures, de manière à ce que tu me
répondes avec certitude que Dieu est immuable? Qu’y a-t-il donc en
ton coeur, quand tu penses à une substance vivante, perpétuelle,
toute-puissante, infinie, partout présente, partout entière et nulle
part enfermée? Cette pensée, c’est la parole venue de Dieu en ton
coeur. Pourtant est-ce là le son formé de quatre lettres et de deux
syllabes? Donc, ce qui se dit et passe, c’est le son, les lettres,
les syllabes. En tant que la parole passe, elle est un son; mais
l’idée signifiée par le son, l’idée qui reste dans la pensée de
celui qui parle et dans l’intelligence de l’auditeur, demeure
toujours bien que le sou disparaisse.
9. Ramène ton attention sur cette parole.
Suppose que tu as dans l’esprit une parole, qui soit comme une
pensée issue de ton intelligence, en sorte que ton âme semble
engendrer cette pensée, et que celle-ci se trouve en ton
intelligence comme son enfant, comme son fils. D’abord, ton esprit
conçoit une pensée, celle de construire un édifice, d’élever sur
terre un immense bâtiment. Celte pensée a déjà donc pris naissance,
mais l’ouvrage que tu médites de faire, n’est pas encore accompli:
tu vois ce que tu dois faire, mais personne autre ne peut l’admirer,
situ ne le fais pas, situ ne construis point ton édifice, situ
n’amènes pas ton bâtiment au degré de perfection qu’il doit
atteindre sous le ciseau du sculpteur. Alors seulement les hommes
portent les regards sur l’œuvre de tes mains; ils admirent la pensée
qui a présidé à cette construction; ils s’étonnent de ce qu’ils
voient, et vont jusqu’à aimer ce qu’ils ne voient pas; mais y a-t-il
un homme capable de considérer ta pensée? Si donc un grand édifice
élevé par l’homme mérite des louanges, veux-tu voir quelle est la
pensée de Dieu Notre-Seigneur Jésus-Christ, c’est-à-dire le Verbe de
Dieu? Regarde l’édifice de ce monde. Vois ce qui a été fait par le
Verbe, et alors tu sauras ce qu’est le Verbe. Regarde les deux
parties de l’univers, le ciel et la terre. Par quelles paroles
expliquer les beautés du ciel? Par quelles paroles, la semence de la
terre? Par quelles louanges célébrer dignement la succession des
saisons, la vertu des semences? Vous voyez ce que je passe sous
silence; je crains, par une énumération plus longue, de laisser mon
discours trop au-dessous de vos pensées. Que le grand ouvrage du
monde vous fasse comprendre quel est le Verbe qui l’a fait, et ce
n’est pas la seule chose qu’il ait faite. Car tout cela se voit et
tombe sous les sens du corps. Le Verbe a aussi créé les anges. Par
ce Verbe ont été faits les Archanges, les Puissances, les Trônes,
les Dominations, les Principautés; par ce Verbe ont été faites
toutes choses. De là faites-vous une idée de ce qu’est le Verbe.
10. Je ne sais qui me répondra peut-être:
Mais ce Verbe, qui est-ce qui le pense? Quand on dit, le Verbe, ne
va pas te former une grossière représentation et croire entendre les
paroles que tu entends chaque jour: Un homme a dit telles paroles,
voici les paroles qu’il a prononcées, tu me les rapportes. Car à
répéter continuellement ce mot parole, il semble que la parole en
soit avilie. Aussi, quand tu entends: « Au commencement était le
Verbe », ne t’imagine pas quelque chose l’ordinaire, semblable à ce
qua coutume de lu rapporter la parole humaine; car écoute ce que tu
dois penser: « Le Verbe était Dieu ».
11. Que je ne sais quel Arien infidèle,
se présente maintenant et dise: Le Verbe de Dieu a été fait. Comment
se peut-il que le Verbe de Dieu ait été fait, quand c’est par le
Verbe que Dieu a fait toutes choses? Si le Verbe de Dieu lui-même a
été fait, par quel autre Verbe a-t-il été fait? Si tu dis qu’il est
le Verbe d’un Verbe qui l’aurait fait, je le déclare, celui-ci est
le Fils unique de Dieu. Si tu ne dis pas qu’il est le Verbe du
Verbe, accorde donc que celui qui a fait toutes choses n’a pas
lui-même été fait. Car il n’a pu être fait par lui-même celui par
qui toutes choses ont été faites. Crois à l’Évangéliste. Il pouvait
dire: Au commencement, Dieu a fait le Verbe, comme Moïse a dit: « Au
commencement Dieu a fait le ciel et la terre », pour continuer son
énumération en ces termes: Dieu a dit: Que cela soit fait, et cela a
été fait
.
Si quelqu’un a parlé, qui a parlé? Assurément Dieu. Et qu’est-ce qui
a été fait? Une créature. Entre Dieu qui a parlé et la créature qui
a été faite, qu’est-ce qui se trouvait pour faire ce qui a été fait?
N’est-ce pas le Verbe, puisque Dieu a dit: Que cela soit fait, et
que cela a été fait? Tel est le Verbe immuable: quoique les choses
muables aient été faites par le Verbe, lui il demeure immuable.
12. Ne va donc pas croire que celui par
qui toutes choses ont été faites, ait été fait lui-même; de peur de
n’être pas refait par ce Verbe, par qui toutes choses sont refaites.
En effet, tu as déjà été fait par le Verbe, mais il faut qu’il te
crée de nouveau; or, si la foi relativement au Verbe n’est pas pure,
tu ne pourras être refait par lai. Si tu as pu être fait par le
Verbe, tu es pour toi-même une cause de déchéance, et si par
toi-même Lu ne peux que déchoir, daigne celui qui t’a fait te
réparer encore. Si de toi-même ta ne peux que perdra, daigne celui
qui t’a créé, te rendre ta grandeur première. Mais comment te
relèvera-t-il par son Verbe, si tu ne penses pas bien de son Verbe?
L’Évangéliste dit « Au commencement était le Verbe », et toi tu dis:
Au commencement a été fait le Verbe. Il dit: « Toutes choses ont été
faites par lui », et, selon toi, le Verbe lui-même a été fait?
L’Évangéliste pouvait dire: Au commencement a été fait le Verbe;
mais qu’a-t-il dit? « Au commencement était le Verbe ». S’il était,
il n’a pas été fait pour que toutes choses fussent faites par lui et
que sans lui rien ne fût fait. Si donc: « Le Verbe était au
commencement, si le Verbe était en Dieu, et si le Verbe était
Dieu », et que tu ne puisses comprendre ce qu’il est, attends que
ton intelligence se développe. Il est l’aliment des forts; reçois le
lait, afin d’être nourri et de devenir assez fort pour supporter une
alimentation solide.
13. Quant à ce qui
suit: « Toutes choses ont été faites par lui, et sans lui rien n’a
été fait », prenez garde, mes frères, de le comprendre en ce sens
que le néant serait quelque chose. En effet, pour plusieurs qui
entendent mal cette parole: « Sans lui rien n’a été fait », c’est
une habitude de penser que le néant est quelque chose. A coup sûr,
le péché n’a pas été fait par lui; aussi est-il manifeste que le
péché est le rien, et que les hommes tombent à rien quand ils
pèchent. De même, les idoles n’ont point été faites par le Verbe: il
est vrai qu’elles ont une certaine forme humaine, mais l’homme dans
son entier a été fait par le Verbe. Pour la forme de l’homme qui est
en l’idole, elle n’a point été faite par le Verbe, et il est écrit:
« Nous savons que les idoles ne sont rien »
.
Donc, elles n’ont pas été faites par le Verbe, mais bien toutes les
choses qui se font naturellement, qui existent dans les créatures,
qui se trouvent dans le ciel, qui brillent au firmament, qui volent
dans ses régions inférieures, qui se remuent dans l’universalité des
êtres; en un mot, toute créature, et pour mieux me faire comprendre,
je dirai d’un seul mot, tout depuis l’ange jusqu’au vermisseau, tout
a été fait par le Verbe. Parmi les créatures, y a-t-il rien de plus
élevé que l’ange? Dans l’échelle des êtres y a-t-il rien de plus bas
que le vermisseau? Celui qui a fait l’ange a fait aussi le
vermisseau; mais il a fait l’ange digne du ciel, et le vermisseau,
il l’a fait pour la ferre. En les créant, il les a mis à leur place.
S’il avait placé le vermisseau au ciel, tu le lui reprocherais; tu
agirais de même s’il lui avait plu de tirer les anges d’une chair
tombée en pourriture; et cependant Dieu le fait ou à peu de chose
près, et il n’est pas répréhensible. Car, tous les hommes nés de la
chair, qui sont-ils, sinon des vert de terre? Et de ces vers, Dieu
fait des anges. Car, si le Seigneur dit de lui-même: « Je suis un
ver et non pas un homme »
,
qui craindra de dire à son tour ce qui est écrit au livre de Job:
« Combien plus l’homme est-il de la pourriture, et le fils de
l’homme un ver de terre? »
D’abord il a dit: « L’homme est de la pourriture »; et ensuite: « Le
fils de l’homme est un ver de terre ». Voilà ce
qu’a voulu devenir pour toi « celui qui
au commencement était le Verbe, et Verbe en Dieu, et Verbe Dieu ».
Pourquoi est-il devenu
cela pour toi? Afin de te donner à sucer du lait, puisque lu ne
pouvais manger encore. Vous devez donc, mes frères, entendre dans le
sens le plus large ces paroles: « Toutes choses ont été faites par
lui et rien n’a été fait sans lui ». Car toutes les créatures ont
été faites par lui; les grandes, les petites, les supérieures, les
inférieures, les spirituelles, les corporelles, c’est lui qui les a
faites. Aucune forme, aucun corps, aucun assemblage de parties,
aucune substance de quelque nature qu’elle soit, rien de ce qui peut
être pesé, compté, mesuré, n’a été fait que par ce Verbe, par ce
Verbe créateur auquel il a été dit: « Vous avez disposé toutes «
choses avec poids, nombre et mesure »
.
14. Que personne donc
ne vous induise en erreur, quand par hasard il vous voit importunés
par les mouches. Car le diable s’est moqué de plusieurs, et les
mouches ont suffi à les prendre. C’est, en effet, la coutume des
oiseleurs de placer des mouches dans leurs piéges, afin de tromper
les oiseaux affamés; ainsi le diable a pris ces hommes avec des
mouches. J’en trouve la preuve dans ce qui est arrivé à je ne sais
quel individu que les mouches importunaient. Rencontré par un
Manichéen au plus fort de cette importunité, il lui dit qu’il ne
pouvait souffrir ces mouches, et qu’il les détestait par-dessus
tout; alors le Manichéen lui adressa cette question: Qui est-ce qui
a créé ces mouches? Importuné comme il l’était, et dans l’excès de
sa haine contre les mouches, il n’osa pas dire: Dieu les a faites;
pourtant c’était un catholique. Si Dieu n’en est pas l’auteur,
reprit aussitôt le, Manichéen, qui donc les a faites? A parler
franchement, dit le catholique, selon moi c’est le diable qui les a
créées. Si le diable a fait la mouche, comme je te vois en convenir,
parce que tu es un homme d’esprit et d’intelligence, qui est-ce qui
a fait l’abeille qui est un peu plus grosse que la mouche? Le
catholique n’osa pas dire, que Dieu n’ayant pas fait la mouche,
n’avait pas fait l’abeille, parce qu’entre l’une et l’autre la
différence était presque imperceptible. Le Manichéen le mena à la
sauterelle, de la sauterelle au lézard, du lézard à l’oiseau, de
l’oiseau au quadrupède; de là au boeuf,
de là à l’éléphant, finalement à l’homme. Ainsi ce malheureux, pour
n’avoir pas su endurer l’importunité des mouches, est devenu mouche,
pour tomber ensuite au pouvoir du diable. Béelzébub signifie, en
effet, dit-on, Prince des mouches; c’est d’elles qu’il est écrit:
« Les mouches mourantes détruisent la suavité du parfum »
.
15. Qu’est-ce donc, mes
Frères, et pourquoi ai-je dit ces choses? Fermez les oreilles de
votre coeur aux suggestions malignes de l’ennemi; comprenez que Dieu
a fait toutes les créatures et qu’il a rangé chacune d’elles à sa
place. Mais pourquoi avons-nous tant à souffrir de la part de ces
créatures que Dieu a faites? Est-ce parce que nous avons offensé
Dieu? Ces maux, est-ce que les anges les endurent? Nous aussi
peut-être devrions-nous ne les avoir point à craindre dans cette
vie. Ta peine, tu dois l’attribuer à ton péché, et non à ton juge.
Car c’est à cause de notre orgueil que Dieu a tiré du néant cette
créature si petite et si abjecte, pour en faire. l’instrument de
notre supplice. Ainsi au moment même où l’homme se laisse emporter à
la superbe et se révolte contre Dieu, au moment où, mortel, il veut
faire trembler d’autres mortels et méprise son semblable, au moment
où il s’exalte il se voit assujetti à une puce. Pourquoi donc te
laisser enfler par l’orgueil humain? Un homme t’a dit une parole
d’outrage, et tu te gonfles de colère; résiste donc aux puces,
essaie de dormir en dépit de leurs morsures et sache qui tu es.
Apprenez, mes Frères, que ces insectes qui nous importunent, ont été
créés pour humilier notre orgueil; car Dieu aurait pu dompter le
peuple superbe de Pharaon avec des ours, des lions et des serpents,
et il s’est borné à leur envoyer des mouches et des grenouilles
afin que la superbe fût domptée par ce qu’il y a de plus vil.
16. « Toutes choses »
donc, mes Frères, « toutes choses sans exception ont été faites par
lui, et sans lui rien n’a été fait ». Mais comment toutes choses
ont-elles été faites par lui? « Ce qui a été fait, en lui est vie ».
Ce qui peut se dire encore en cette façon: « Ce qui a été fait en
lui, est vie ». Donc si nous construisons ainsi cette phrase, tout
est vie. Qu’y a-t-il en effet qui n’ait pas été fait en lui? Il est
la sagesse de Dieu, et il est dit en un psaume: « Vous avez fait
toutes choses dans votre sagesse »
.
De même donc que toutes choses ont été faites par lui, de même
« elles ont été faites en lui ». Que si toutes choses ont été faites
en lui, mes très chers Frères, et si ce qui a été fait en lui est
vie, donc la terre est vie, donc le bois aussi est vie. A la vérité,
il est un bois que nous appelons vie, mais nous entendons le bois de
la Croix, d’où nous avons reçu la vie. Donc la pierre aussi est vie.
Inconvenante manière de comprendre les choses, qui nous ferait
retomber dans les abominables erreurs des Manichéens, et nous ferait
dire qu’une pierre a la vie, qu’un mur aussi a une âme, comme aussi
un petit filet, la laine, un vêtement. Voilà ce que débitent
d’ordinaire ces hérétiques en délire; et quand ils se voient
réprimés et confondus, ils tirent en quelque sorte de l’Écriture
leur justification, et ils disent: Pourquoi donc a-t-il été écrit:
« Ce qui a été fait en lui, est vie? » Car si tout a été fait en
lui, tout est vie. Garde-toi de te laisser entraîner à leur suite.
Lis de cette manière: « Ce qui a été fait »; arrête-toi là, puis
continue et ajoute: « est vie en lui ». Qu’est-ce à dire? La terre a
été créée, mais cette terre, qui a été créée, n’est pas vie: au sein
de la Sagesse se trouve l’archétype immatériel d’après lequel la
terre a été faite, et cet archétype est vie.
17. Je vais expliquer
ceci à votre charité, comme je le pourrai. Un menuisier fait un
coffre. D’abord, il conçoit l’idée de ce coffre, car s’il n’en avait
pas le plan dans la tête, qu’est-ce qui le guiderait dans
l’exécution de son ouvrage? Mais ce coffre n’est pas, dans la pensée
de l’ouvrier, ce qu’il est quand il apparaît aux regards des
spectateurs; invisible dans le plan, il sera visible quand il sera
fait. Le voilà, il a passé en oeuvre; a-t-il cessé pour cela
d’exister en idée? Un coffre a été fait, mais celui qui était dans
la pensée reste le même. En effet, le premier peut tomber en
poussière, et de nouveau on en peut faire un autre d’après celui qui
est en l’idée. Considérez donc qu’il y a deux coffres, l’un en idée,
l’autre en oeuvre. Le coffre en oeuvre n’est pas vie, le coffre en
idée est vie, parce qu’il vit dans la pensée de l’ouvrier, où tout
ce qu’il fait existe avant d’être produit au dehors. Pareillement,
mes frères, la sagesse de Dieu, par laquelle toutes
choses ont été faites, possède en
elle-même l’archétype de tous les êtres antérieurement à leur
création; d’où il suit que ce qui se fait d’après cet archétype
n’est pas vie pour cela. Mais tout ce qui a été fait est vie en
Dieu. Tu vois la terre, cette terre existe aussi dans l’idée de
Dieu; tu vois le ciel, le ciel existe aussi dans la pensée de Dieu;
tu vois le soleil et la lune, ils y existent aussi. Mais tels que tu
les vois au dehors, ils sont des corps; tels qu’ils se retrouvent
dans la pensée de Dieu, ils sont vie. Comprenez comme vous le
pourrez; car ce que je viens de vous dire est grand. S’il ne tire
pas de moi sa grandeur et que je ne puisse y contribuer en aucune
façon, il la puise dans son objet même. Je suis, en effet, trop peu
de chose pour vous tenir de moi-même un pareil langage; mais celui
vers qui je porte mes regards afin de pouvoir vous parler, ne peut
m’être comparé. Que chacun prenne ce qu’il peut, autant qu’il le
peut; pour celui qui ne peut rien prendre, qu’il nourrisse son coeur
afin de pouvoir. De quoi le nourrir? Qu’il le nourrisse de lait,
afin d’en venir ensuite à une alimentation plus solide. Qu’il ne
s’éloigne pas de Jésus-Christ, né selon la chair, jusqu’à ce qu’il
parvienne à Jésus-Christ, né d’un Dieu unique, Verbe Dieu, demeurant
en Dieu, par qui toutes choses ont été faites, parce que c’est la
vie qui en lui est la lumière des hommes.
18. Car voici ce qui
suit: « Et la vie était la lumière des hommes »; en effet, c’est
cette même vie qui les éclaire. Les bêtes n’ont pas cette lumière,
parce qu’elles n’ont pas d’âme raisonnable capable de voir la
sagesse. Mais l’homme, fait à l’image de Dieu, a une âme raisonnable
par laquelle il peut la percevoir. Donc, cette vie par laquelle
toutes choses ont été faites, cette même vie est lumière, non pas la
lumière des animaux quels qu’ils soient, mais la lumière des hommes.
Aussi l’Évangéliste dit peu après: « Elle était la vraie lumière qui
éclaire tout homme venant en ce monde ». Jean-Baptiste a été éclairé
par cette lumière comme aussi Jean l’évangéliste. De cette lumière
était rempli celui qui a dit: « Je ne suis pas le Christ, mais c’est
celui qui vient après moi, et dont je ne suis pas digne de délier,
les cordons des souliers »
.
De cette lumière était éclairé celui qui a dit: « Au commencement
était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était
Dieu ». Donc cette vie est la lumière des
hommes.
19. Mais peut-être des
coeurs insensés se trouvent-ils dans l’impossibilité de recevoir les
rayons de cette lumière parce qu’ils sont appesantis par leurs
péchés, qui leur en interceptent la vue. De ce qu’ils sont
incapables de l’apercevoir, qu’ils n’aillent pas croire à sa
non-existence, car ils sont devenus ténèbres à cause de leurs
fautes: « Et la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne
l’ont pas comprise ». De même qu’un aveugle, placé en face du
soleil, est absent pour lui, quoique celui-ci l’inonde de ses
rayons; ainsi tout insensé, tout pécheur, tout impie est aveugle en
son coeur. La sagesse est devant lui, mais comme elle brille aux
yeux d’un aveugle, elle est pour lui comme absente. Non qu’elle soit
absente à lui, mais parce que lui est absent d’elle. Que lui faut-il
donc faire? Qu’il purifie ce qui peut lui faire voir Dieu. Si un
homme ne peut voir parce qu’il a les yeux souillés et malades, parce
que la poussière, l’humeur ou la fumée viennent les obscurcir, le
médecin lui dit: Nettoie tes yeux, ôte ce qu’il y a en eux de
mauvais, afin qu’ils puissent voir la lumière. La poussière,
l’humeur, la fumée, ce sont tes péchés et tes fautes. Ôte-les de ton
cœur, et tu apercevras la sagesse qui est toujours présente devant
toi; car Dieu est cette sagesse, et il est écrit: « Bienheureux ceux
qui ont le coeur pur, parce qu’ils verront Dieu »
.
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