De l’or
très pur fut fourni par David, pour qu’on en fit une représentation
du quadrige des Chérubins, qui étendent leurs ailes et abritent
l’Arche d’alliance (Paral. XXVIII, 18).
… Ainsi,
à l’honneur de Dieu, pour l’édification des âmes, pour la
consolation du lecteur et de l’auditeur, la méditation de la Sainte
Ecriture, en des textes pris à l’un et à l’autre Testament, nous a
fourni la matière d’un quadrige, où l’âme pourra prendre place avec
Elie (4 Rois, II, 11), pour s’élever au dessus des choses
temporelles, se laisser emporter vers le ciel, mener une vie digne
du ciel.
Un
quadrige a quatre roues. Ainsi le présent ouvrage touche à quatre
objets : l’évangile du dimanche, l’histoire de l’Ancien Testament
qui se lit à l’office, l’introït et l’épître de la messe dominicale.
J’ai essayé de lier et d’accorder ensemble ces quatre objets, autant
que la grâce divine me l’a permis et que la maigre veine de ma
modeste science a répondu. Avec Ruth la Mohabite, dans le champ de
Booz, derrière les moissonneurs, j’ai glané, timide et honteux.
(Ruth, II, 3). Un ouvrage tel qu’il le faudrait est au dessus de mes
forces. Seules les prières et la charité de mes frères, qui me
poussaient, ont eu raison de moi.
L’esprit
du lecteur pourrait être dérouté et se perdre, tant la matière est
abondante, et diverse la concordance des textes. C’est pourquoi,
suivant ce que Dieu nous a inspiré, nous avons divisé les évangiles
en sections ; à chaque section nous avons rattaché les passages
correspondants de l’Ancien Testament et des épîtres. Nous avons
expliqué assez longuement les évangiles et l’Ancien Testament, plus
sommairement et en abrégé l’introït et l’épître ; car des
développements exagérés fatiguent. Mais il est très difficile
d’enfermer dans un discours bref et utile une matière si étendue.
L’insipide sagesse des lecteurs et des auditeurs de notre temps en
est venue à ce point qu’il leur faut trouver et entendre des phrases
soignées, du nouveau qui fasse du bruit ; sinon ils se dégoûtent de
lire, ils ne prennent pas la peine d’écouter. Nous n’avons pas voulu
que la parole de Dieu, au péril de leurs âmes, leur fût un objet de
dégoût ou de mépris. C’est pourquoi au début de chaque évangile nous
avons placé un prologue en accord avec le texte. Pour la même raison
nous avons inséré dans notre ouvrage certaines observations sur les
propriétés des choses et des animaux, ainsi que les étymologies des
noms, avec des applications morales.
… A toi,
Jésus-Christ, Fils bien-aimé de Dieu le Père ; à toi, qui opères
tout le bien qui est en nous ; à toi toute louange, toute gloire,
tout honneur, tout respect ; à toi qui es
a
et
w,
principe et fin ;
à toi qui dans ta bonté et par ta grâce, m’a accordé de parvenir à
la fin, longtemps souhaitée, de cet ouvrage.
Très
chers frères, moi le plus petit de vous tous, moi votre frère et
votre serviteur, pour votre consolation, pour l’édification des
fidèles, pour la rémission de mes péchés, j’ai composé de mon mieux
ce travail sur les évangiles de l’année. Je vous en prie et vous en
supplie, quand vous lirez quelques passages de ce livre, offrez un
souvenir pour moi, votre frère, au Fils de Dieu, Dieu lui-même, qui
s’est offert à son Père sur le gibet de la croix. Je vous le demande
aussi : quand vous trouverez dans cet ouvrage, quelque chose
d’édifiant, de consolant, de bien dit, ou de bien composé, n’en
reportez toute louange, toute gloire et tout honneur qu’à
Jésus-Christ, le bienheureux et béni Fils de Dieu ; mais ce que vous
trouverez de mal ordonné, d’insipide, de mal dit, imputez le à ma
misère, à mon aveuglement, à mon ignorance. Enfin, tous les endroits
de ce volume qui appellent suppression ou correction, je les soumets
aux savants de notre Ordre, afin que, selon leur discrétion, ils les
éclaircissent et les corrigent.
È
Il y aura
des signes dans la lune… Saint Jean dit dans l’apocalypse (VI,
12) : la lune devint toute de sang. Et Joël (II, 31) : la
lune se changera en sang.
Dieu fit
deux luminaires, un grand et un petit (Gn., I, 16). Ces deux
luminaires représentent les deux créatures raisonnables : le grand
luminaire est l’esprit angélique, le petit luminaire est l’âme
humaine…, créée pour goûter les choses du ciel, pour louer le
créateur parmi les esprits bienheureux, pour tressaillir de joie
avec les fils de Dieu. Mais au voisinage de la terre où elle vit,
l’âme s’est obscurcie, elle a perdu de son éclat. Si elle veut
recouvrer cet éclat, il faut que d’abord elle se change toute en
sang.
Le sang, c’est
la contribution du cœur. L’Apôtre dit aux Hébreux ( IX, 19-22) :
Moïse prit le sang avec de l’eau, de la laine pourpre et de
l’hysope ; il en aspergea le livre et tout le peuple en disant :
C’est le sang du testament que Dieu nous a donné. Il aspergea de
même le tabernacle et tous les vases sacrés. Tout est purifié dans
le sang, et sans effusion de sang il n’y a pas de pardon. Voilà
comment la lune se change en sang. Voyons ce que signifient
moralement Moïse, le sang, l’eau, la laine pourpre, l’hysope, le
livre, le peuple, le tabernacle et les vases.
Quand
Jésus-Christ, qui est miséricorde et pitié (Ps. CX, 4), vient
dans l’âme du pécheur, alors Moïse prend le sang… Moïse est le
pécheur converti sauvé des eaux de l’Egypte. Le pécheur doit prendre
le sang de la contrition douloureuse ; l’eau de la confession
baignée de larmes ; la laine de l’innocence, mais empourprée par la
charité fraternelle ; enfin, l’hysope de la véritable humilité. Il
doit asperger le livre, le secret de son coeur ; tout le peuple de
ses pensées ; le tabernacle qui est son cœur ; les vases du
tabernacle qui sont ses cinq sens. Dans le sang de la contrition,
tout est purifié, tout est pardonné, si toutefois on a la volonté de
se confesser. Sans la contrition, il n’y a pas de rémission du
pécher.
Donc il y aura
des signes dans la lune. Les signes intérieurs de la contrition sont
manifestés par les signes extérieurs de la pénitence. Quand la
chasteté resplendit dans le corps, l’humilité dans les actions,
l’abstinence dans la nourriture, la pauvreté dans le vêtement, alors
s’annonce la sanctification intérieure… Ces quatre vertus ornent le
sanctuaire du seigneur (Is., LX, 13), L’âme du pénitent, en laquelle
Dieu se repose. “Nous viendrons à lui, dit il, et nous ferons en
lui notre demeure”. (Jean, XIV, 23).
C’est le second
avènement du Seigneur. Il en est aussi question dans la seconde
partie de l’épître de ce dimanche : la nuit est passée, le jour
est venu. Comme le dit Isaïe (XXVI, 3), l’erreur ancienne
s’en est allée ; tu nous garderas la paix : la paix, car en toi,
Seigneur, nous espérons. La nuit et l’erreur signifient
l’aveuglement du péché ; le jour et la paix signifient
l’illumination de la grâce. Le mot “paix” est répété, pour marquer
le repos intérieur et extérieur que possède l’homme, quand Dieu
siège sur son trône haut et élevé (Is., VI, 1).
Rejetons
donc les œuvres des ténèbres. Dans le même sens, Isaïe nous dit
(II, 20) : en ce jour, l’homme rejettera les idoles d’or et
d’argent, qu’il s’était faites quand il adorait les taupes et les
chauves-souris.
L’argent c’est
l’éloquence ; l’or, la sagesse ; les taupes, l’avarice ; les chauves
souris, la vaine gloire. La taupe, aveugle, creuse la terre. La
chauve souris ne voit pas en plein jour, car son œil manque de
l’humeur cristalline ; elle a les ailes liées aux pieds. L’homme
charnel, qui a le goût de la terre, se fait des idoles de l’argent
et de l’or, de son éloquence et de sa sagesse. Ces idoles sont les
taupes et les chauves souris, l’avarice et la vaine gloire. Telles
sont les œuvres des ténèbres. L’avarice en effet, n’a pas la lumière
de la sainte pauvreté ; elle creuse la terre, elle aime les biens
terrestres. La vaine gloire, qui se complaît dans le jour humain, ne
voit pas le jour divin ; elle a les ailes qui pourraient l’emporter
vers le ciel, mais ces ailes sont liées aux pieds, aux affections
charnelles ; elle n’a d’autre désir que d’être vue, et louée par les
hommes… Mais au jour où la grâce l’éclaire, au jour qui est arrivé,
l’homme rejette taupes et chauves souris, ces animaux qui ne voient
pas les œuvres des ténèbres.
Alors on en
vient à ce que dit l’Apôtre ensuite : Revêtez vous des armes de
la lumière ; et à ce que dit Isaïe (LII, 1) : lève-toi,
lève-toi ; revêts-toi de ta force, ô Sion ; prends les vêtements de
ta gloire, ô Jérusalem, cité du Saint ! Sion et Jérusalem
signifient l’âme : quand elle pêche, elle est captive du diable ;
quand elle fait pénitence, elle se redresse et se lève. Levez-vous
par la contrition ; levez-vous par la confession ; revêtez-vous de
force par la persévérance ; prenez vos vêtements de gloire, la
double charité ; alors vous serez la cité du Saint Esprit.
È
Les aveugles
voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds
entendent, les morts ressuscitent, les pauvres sont évangélisés.
Voyons le sens
moral de ces mots. Les aveugles, ce sont les orgueilleux ; les
boiteux, les hypocrites ; les lépreux, les luxurieux ; les sourds,
les avares ; les morts, les gourmands ; les pauvres, les humbles.
Les aveugles
voient. Ainsi parle Isaïe (XIX, 18) : Délivrés des ténèbres et de
l’obscurité, les yeux des aveugles verront la lumière. Et
ailleurs (IIL, 19,20) : Qui est aveugle sinon celui qui été
vendu ? Qui est aveugle sinon le serviteur du seigneur ? Toi qui
vois beaucoup de choses, n’observeras tu pas ? De nos jours,
aveugles et orgueilleux sont ceux qui sont appelés serviteurs du
seigneur, ceux qui paraissent servir le seigneur. Orgueilleux, ils
voient beaucoup de choses dans les saintes écritures, ils enseignent
et prêchent beaucoup de choses ; mais ils n’observent pas les
commandements qu’ils prêchent. Ils voient beaucoup pour les autres,
rien pour eux. Pourquoi, dit Isaïe (XXII, 1, 2) es tu
montée sur les toits, pleine de clameurs, ville remplie de peuple,
cité exultante ? On supporterait, veut-il nous dire, que les
séculiers aient de l’ambition ; mais vous, qui êtes religieux et
instruits, vous qui voyez beaucoup de choses, qu’avez-vous donc vu,
pour vouloir vous élever, pour monter sur les toits ? La ville est
pleine de clameurs ; car l’orgueil aime les cris. Malheur,
dit Isaïe (XXII, 1, 2), à la multitude des peuples nombreux,
bruyante comme la mer. De l’humble, au contraire, il nous dit
(XIIL, 2) : Il ne criera point, on n’entendra point sa voix au
dehors. Il dit ailleurs (XXXII, 13 ; XXXIII, 20), au sujet de la
ville remplie de peuple, de la cité orgueilleuse : Sur la terre
de mon peuple – c'est-à-dire sur l’âme des humbles, –
monteront les épines et les ronces, – c'est-à-dire les
tribulations et les peines : – combien d’avantage sur toutes les
maisons joyeuses de la cité orgueilleuse, – c'est-à-dire sur
l’orgueil, qui aveugle les yeux de l’âme, et l’empêche de voir la
cité de l’éternelle joie ! Regarde ô Sion, la ville de notre
solennité : tes yeux verrons Jérusalem, la demeure opulente.
Pour la voir, oins tes yeux du collyre de l’humilité. Alors Jésus te
dira : regarde, ton humilité t’a éclairé…
Les boiteux
marchent… L’hypocrite marche difficilement sur la route de la vie.
Car celui qui fait le mal hait la lumière et craint que ses
œuvres soient condamnées par la lumière (Jean, III, 20).
Malheur à vous qui dans le fond de votre cœur cachez votre iniquité,
pour que le seigneur ne voit pas vos desseins ; vos œuvres se font
dans les ténèbres et vous dites : qui nous verra, qui nous
connaîtra ? (Is., XXIX, 15). L’hypocrite cloche d’un pied : il a
un pied en l’air et l’autre sur le sol. Le pied en l’air, c’est la
pauvreté qui paraît en son vêtement, l’humilité dans sa voix, la
pâleur sur son visage. Mais par là il cherche la louange, il veut
paraître saint : c’est l’autre pied posé sur le sol. Il y a une
autre explication tirée du second livre des rois (IV, 4) :
Méphiboseth clochait des deux pieds… Ces deux pieds sont le
désir et l’action. Ceux qui clochent ainsi sont dignes de
l’éternelle confusion : car tel est le sens du nom de Méphiboseth…
Pour échapper à cette confusion, il faut marcher droit, par la bonne
volonté dans le désir, et par l’humilité dans l’action. Alors les
boiteux marcheront.
Les lépreux
sont purifiés. On voit, au quatrième livre des Rois (V, 1) que
Naaman était un homme puissant et riche, mais lépreux. Car là où
se trouvent les richesses et l’abondance des délices, là règne la
lèpre de la luxure. Isaïe, après avoir dit (II, 7) : leur terre
est remplie d’argent et d’or et de trésors sans fin, ajoute
aussitôt : et leur terre est remplie de chevaux, c'est-à-dire
de luxurieux. On voit dans l’Exode que l’or servit à fabriquer le
veau de la luxure déchaînée… Job dit de la luxure (XXXI, 12) :
c’est un feu qui consume tout et extermine les rejetons. O
lépreux, lavez vous, soyez purs ; éloignez des regards du
seigneur le mal de vos pensées impures ; cessez de faire le mal
(Is., I, 16) dans vos corps afin que l’on puisse dire : les lépreux
sont purifiés.
Les sourds
entendent. En ce jour dit Isaïe (XXIX, 18), les sourds entendrons
les paroles du livre. Les sourds sont les avares et les
usuriers, qui ont les oreilles bouchées par l’amas de leur vilain
argent. Ils sont, dit le psaume (LVII, 5), comme des serpents
irrités, qui se bouchent les oreilles. On dit que le serpent,
pour ne pas entendre la voix du charmeur, applique contre le sol une
de ses oreilles et ferme l’autre avec sa queue.
È
Sermons sur la Vierge Marie
Nativité - Annonciation - Purification - Assomption
(Si 50, 6-10).
« Comme l'étoile du matin au milieu des nuages,
comme la lune en son plein,
comme le soleil rayonnant sur le Temple du Très-Haut,
comme l'arc-en-ciel brillant dans les nuages de gloire,
comme la rosée au printemps, comme un lis près de la source,
comme un rameau de l'arbre à encens en été,
comme le feu et l'encens dans l'encensoir,
comme un vase d'or massif, orné de toutes sortes de pierres
précieuses,
comme un olivier chargé de fruits, comme un cyprès s'élevant
jusqu'aux nuages »
Voici les douze pierres
précieuses enchâssées dans le diadème du chef d'Aaron. Voici les
douze étoiles dans la couronne de la Vierge. En son honneur, et
selon que Notre Dame elle-même nous l'accordera, nous commentons ce
passage du Siracide en quatre sermons, d'après ses quatre fêtes :
Nativité, Annonciation, Purification et Assomption.
Sermon pour la
Nativité de la Vierge
Comme l'étoile
du matin au milieu des nuages
L'étoile du matin
s'appelle Lucifer, parce qu'elle brille plus claire que toutes les
étoiles. Ce Lucifer qui précède le soleil, annonce le matin et
arrose par l'éclat de sa lumière les ténèbres de la nuit, désigne la
Vierge Marie qui a annoncé au matin de la grâce le soleil de justice
à ceux qui étaient dans les ténèbres.
Comme la lune
en son plein
La Vierge Marie est
appelée « lune pleine », car elle est parfaite sous tous ses
aspects. La lune est imparfaite et semi-pleine quand elle a des
taches et des formes en croissant. La Vierge Marie n'eut pas de
tache à sa naissance puisqu'elle fut sanctifiée dans le sein de sa
mère. Elle n'en eut jamais durant sa vie ; c'est pourquoi elle
brille pleine et parfaite et comme la lumière, elle dissout les
ténèbres.
Nous te prions, ô Notre
Dame, Toi, qui es l'étoile du matin, chasse par ta splendeur le
nuage de la tentation du diable qui recouvre la terre de notre
esprit.
Toi, qui es la lune en
son plein, remplis le vide de notre coeur, dissous les ténèbres de
nos péchés, afin que nous méritions de parvenir à la plénitude de la
vie éternelle et à la lumière de la gloire infinie.
È
Sermon pour
l'Annonciation de la Vierge Marie
Comme le
soleil resplendissant sur le Temple du Très-Haut
Le soleil possède trois
propriétés : la splendeur, la blancheur et la chaleur. Ces trois
propriétés répondent aux trois paroles de l'Ange : Ave, pleine de
grâce ; Ne crains pas ; L'Esprit Saint surviendra sur toi.
- La splendeur
« Ave, pleine de grâce,
le Seigneur est avec toi ; tu es bénie entre les femmes ».
Voilà la splendeur du soleil, voilà les vertus dont elle a brillé.
- Elle eut la tempérance, la modestie dans les paroles, l'humilité
dans le coeur.
- Elle fut prudente lorsque, troublée, elle se tut, comprit ce qu'on
lui avait dit, répondit à ce qui lui fut proposé.
- Elle fut juste lorsqu'elle donna a chacun son dû.
- Elle fut forte dans ses fiançailles, lors de la circoncision de
son Fils et de la purification légale.
- Elle fut compatissante envers les affligés, lorsqu'elle dit : «
Ils n'ont plus de vin » (Jn 2, 3).
- Elle fut en communion avec les saints lorsqu'elle était assidue
dans la prière, au cénacle, avec les apôtres et quelques femmes (cf.
Ac 1, 14).
- La blancheur
« Voici que tu
concevras et tu enfanteras un fils, et tu l'appelleras du nom de
Jésus. »
Voici la blancheur du soleil.
Comment aurait-elle pu concevoir la lumière éternelle et le miroir
sans tache, si elle n'avait été elle-même toute blanche ?
De cette blancheur, son Fils dit dans le Cantique : « Ton ventre est
une masse d'ivoire, couverte de saphirs » (Ct 5, 14). L'ivoire,
blanc et froid, désigne la double pureté de l'esprit et du corps. La
pierre du saphir, de couleur céleste, désigne la contemplation.
Le ventre de la Vierge
Marie fut d'ivoire et couvert de saphirs parce qu'elle avait la
blancheur de la virginité dans son corps et la beauté de la
contemplation dans son âme.
- La chaleur
Le Saint-Esprit
surviendra sur toi. Voici la chaleur.
La chaleur est l'aliment et la nourriture de tous les vivants ;
lorsqu'elle manque, c'est la chute et la mort.
La chaleur est la grâce du Saint-Esprit. Si elle se retire du coeur
de l'homme, la sève de la componction vient à manquer et l'âme
malheureuse tombe dans la mort du péché. Mais si la chaleur revient,
si le Saint-Esprit survient, Marie conçoit et enfante le fruit béni
qui ôte toute malédiction.
Comme
l'arc-en-ciel brillant dans un nuage de gloire
L'arc-en-ciel se forme
lorsque le soleil entre dans un nuage.
Il a quatre couleurs : fuligineux, azur, doré et de feu. Ainsi,
lorsque le soleil de justice, le Fils de Dieu, est entré dans la
glorieuse Vierge, elle est devenue comme un arc-en-ciel brillant, un
signe d'alliance, de paix et de réconciliation, entre « nuages de
gloire » c'est-à-dire entre Dieu et le pécheur.
Remarquez encore que la couleur fuligineuse de l'arc désigne la
pauvreté de Marie ; l'azur, son humilité ; le doré, sa charité ; le
feu, dont la flamme ne peut ni être partagée ni endommagée par
l'épée, sa virginité intacte.
Viens donc, notre Dame,
unique espérance !
Eclaire, nous t'en supplions, notre esprit par la splendeur de ta
grâce, purifie-le par la candeur de ta pureté, réchauffe-le par la
chaleur de ta présence.
Réconcilie-nous tous avec ton Fils, afin que nous puissions parvenir
à la splendeur de sa gloire.
Que nous l'accorde celui qui, aujourd'hui, à l'annonce de l'ange, a
voulu prendre de toi sa chair glorieuse et rester enfermé pendant
neuf mois dans ton sein.
A lui, honneur et gloire pour les siècles éternels ! Amen !
Comme la rose
au printemps
L'enfantement de Marie
est comparé à la rose et au lis. De même que ces fleurs, tout en
répandant un parfum très agréable, ne se détériorent jamais, Marie a
gardé intacte sa virginité lorsqu'elle a donné le jour au Fils de
Dieu.
« Comme la rose au
printemps ».
Le printemps (en latin ver) est ainsi appelé parce il verdoie. Au
printemps, la terre se revêt d'herbe et se colore de fleurs
bariolées, la température s'adoucit, les oiseaux jouent de la
cithare et tout semble sourire.
Nous te rendons grâce,
Père saint, parce qu'au milieu des grands froids, tu nous as donné
un temps printanier dans la naissance de ton Fils Jésus. Aujourd'hui
la Vierge, terre bénie et remplie des bénédictions du Seigneur, a
enfanté l'herbe verdoyante, le Fils de Dieu, pâturage des pénitents.
Aujourd'hui les anges chantent : « Gloire à Dieu au plus haut des
cieux. » Aujourd'hui sont rétablies sur terre la tranquillité et la
paix.
Que cherches-tu encore
? Tout sourit, tout se réjouit. « Je vous annonce une grande joie,
qui sera celle de tout le peuple, dit l'ange aux bergers :
aujourd'hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur. Et
ceci vous servira de signe : vous trouverez un nouveau-né enveloppé
de langes et couché dans une crèche" (Lc 2, 10-12).
Comme un lis
près d'une source
De même que les lis le
long d'un cours d'eau conservent leur fraîcheur, leur beauté et leur
parfum, la Vierge Marie garda la fraîcheur et la beauté de sa
virginité, lorsqu'elle donna le jour à son Fils.
Nous te prions donc, ô
Notre Dame, Mère nourricière de Dieu :
Dans la Nativité de ton Fils, que tu as engendré en demeurant
vierge, que tu as enveloppé de langes et déposé dans une crèche,
obtiens-nous son pardon, guéris les brûlures de notre âme, que nous
avons provoquées par le feu du péché ; guéris-les avec le baume de
ta miséricorde, par laquelle nous méritions de parvenir au bonheur
du festin éternel.
Que nous l'accorde celui qui, aujourd'hui, a daigné naître de toi, O
Vierge glorieuse, et à qui soit honneur et gloire pour tous les
siècles des siècles. Amen !
È
Sermon pour la
Purification de Marie
Comme un
rameau de l'arbre à encens en été
Le mot encens vient du
grec Theos qui signifie "Dieu", en l'honneur de qui il est brûlé.
L'arbre à encens
s'appelle « liban ». "Comme le liban non entaillé, dit la Vierge
dans le Siracide, j'ai rempli de parfum mon habitation " (cf. Si 24,
12). L'arbre de l'encens est une plante d'Arabie, très haute, d'où
est extraite une gomme-résine aromatique. L'encens est cueilli deux
fois par an, en automne et au printemps.
Cet arbre est la figure
de Marie. Elle ne fut incise par aucun fer de concupiscence. Elle
parfume de vertus et d'amour l'âme dans laquelle elle habite. Elle
émane d'elle l'encens parfumé, l'humanité de Jésus Christ, dont le
parfum a rempli le monde entier.
- La double offrande du
Christ
La double cueillette de
l'encens représente la double offrande du Christ. Dans la première,
la Mère l'offrit dans le temple selon la prescription de la loi de
Moïse ; dans la seconde, le Christ s'offrit lui-même en sacrifice à
Dieu le Père, pour la réconciliation du genre humain.
- L'offrande de Marie
Dans sa pauvreté, Marie
offrit son Fils et l'offrande des pauvres, une paire de tourterelles
et deux jeunes colombes. Voici ce que prescrivait la loi : « Si une
femme est enceinte et enfante un garçon, elle sera impure pendant
sept jours. Quand sera achevée la période de sa purification, après
quarante jours, elle apportera un agneau à l'entrée de la Tente. Si
elle ne le trouve pas ou si elle n'a pas la possibilité d'offrir un
agneau, elle offrira deux tourterelles ou deux jeunes colombes »
(cf. Lv 12, 2.6.8). L'offrande de Marie fut donc l'offrande des
pauvres qui n'avaient pas la possibilité de se procurer un agneau.
Tout cela manifeste l'humilité et la pauvreté du Seigneur et de sa
Mère. C'est cette offrande que font au Seigneur ceux qui sont
pauvres.
« Comme feu
resplendissant et encens qui brûle dans le feu ».
Jésus Christ a
resplendi comme un feu devant les bergers lors de sa Nativité,
devant les mages lors de sa Manifestation, devant Syméon et Anne
lors de la Purification de sa Mère. Dans sa Passion, en revanche, il
a brûlé comme encens au feu, et de son parfum furent remplis les
cieux, la terre et les enfers. Les anges du ciel se réjouissent de
la rédemption du genre humain ; sur terre les hommes qui étaient
morts furent ressuscités ; dans les enfers, les prisonniers furent
libérés.
Nous te prions, ô Notre
Dame, Mère choisie de Dieu, purifie-nous du sang de nos péchés
afin que nous puissions parvenir à la gloire de la Jérusalem
céleste.
Que nous l'accorde celui qu'aujourd'hui tu as offert dans le temple
:
A lui soit honneur et gloire dans les siècles des siècles. Amen !
È
Sermon pour
l'Assomption de Marie
« Il posa sur
sa tête le diadème royal ».
« Venez, dit le
Cantique, contemplez, filles de Sion, le roi Salomon, avec le
diadème dont sa mère l'a couronné, au jour de ses épousailles >, (Ct
3, 11).
La Vierge Marie a
couronné le Fils de Dieu avec le diadème de la chair humaine, le
jour de ses épousailles, lorsque la nature divine fut unie, comme un
époux, à la nature humaine, dans la chambre nuptiale de la Vierge
Marie. Aujourd'hui, le Fils a couronné sa Mère du diadème de la
gloire céleste.
Venez, admirez la Mère
avec le diadème dont son Fils l'a couronnée, aujourd'hui, jour de
son Assomption.
Vase d'or
L'humilité se conserve
par la pauvreté. La pauvreté est dite « d'or » parce qu'elle rend
riches ceux qui la possèdent.
Où il y a la vraie
pauvreté, il y a le nécessaire. Où il y a l'abondance, il y a
l'indigence.
Or éclatant de la
pauvreté ! Celui qui ne te possède pas , même s'il possède tout le
reste, n'a rien ! Les biens temporels enflent et s'évanouissent.
Dans la pauvreté, il y a la joie ; dans les richesses, la tristesse
et le tourment.
« Mieux vaut une bouchée de pain sec avec la tranquillité, dit
Salomon, qu'un veau engraissé avec la discorde ou une maison pleine
de victimes, Mieux vaut peu de biens avec la crainte du Seigneur que
de grands trésors qui ne rassasient pas, Mieux vaut habiter un pays
désert qu'avec une femme querelleuse et chagrine.
Mieux vaut une habitation à l'angle d'un toit que faire maison
commune avec les autres »
(cf. Pr 17, 1 ; 15, 15-16 ; 21, 19 et 21, 9).
Vase d'or
massif
L'humilité et la
pauvreté de la Vierge Marie furent ornées de la pureté ; c'est
pourquoi on ajoute : Vase d'or massif.
Ce vase a été orné de toutes sortes de pierres précieuses ,
privilèges et dons célestes. Celle qui engendra le Créateur et le
Rédempteur réunit en elle-même les mérites de tous les saints.
O incomparable dignité
de Marie, abîme insondable de miséricorde. Jamais à un ange ni à un
homme ne fut ou ne sera donné une telle grâce et autant de
miséricorde que celles qui furent données à la Vierge que Dieu le
Père a voulu comme Mère de son Fils. Ce serait une grâce et une
dignité très grande pour une simple femme que d'avoir un fils avec
un empereur. Vraiment supérieure à toute grâce fut celle de Marie
qui eut un Fils en commun avec le Père Eternel. A cause de cela,
elle a mérité aujourd'hui d'être couronnée au ciel.
Olivier chargé
de fruits
L'olivier est la plante
; l'olive, le fruit ; l'huile, le suc. L'olivier produit une fleur
parfumée, d'où se forme l'olive qui est d'abord verte, puis rouge et
enfin mûre.
Sainte Anne fut
l'olivier d'où germa la fleur au parfum incomparable de la Vierge
Marie. Celle-ci fut verte, demeura vierge dans la conception et la
nativité du Sauveur, avant l'enfantement et dans l'enfantement ;
elle fut rouge dans la passion de son Fils, lorsque l'épée
transperça son âme ; elle fut mûre dans l'Assomption d'aujourd'hui,
car elle est épanouie et possède le bonheur de la gloire céleste.
Prenant part à sa joie,
nous chantons dans l'introït de la messe de ce jour : «
Réjouissons-nous tous dans le Seigneur »
Cyprès
s'élevant jusqu'aux nuages
Comme un cyprès, la
Vierge Marie s'élève aujourd'hui plus haut que tous les anges.
A ce sujet, nous lisons
dans Ezéchiel : « Au-dessus du firmament qui était sur la tête des
quatre animaux, apparut quelque chose qui avait l'aspect d'une
pierre de saphir en forme de trône, et sur cette forme de trône,
tout en haut, un être ayant apparence humaine » (Ez 1, 26).
Dans les quatre animaux
sont représentés tous les saints, décorés de vertus et instruits de
l'enseignement des quatre évangiles ; dans le firmament, les choeurs
des anges ; dans le trône, la Vierge Marie, dans laquelle le
Seigneur s'humilia lorsqu'il prit chair en elle. Dans le fils
d'homme, Jésus Christ, Fils de Dieu et de l'homme. Dans la gloire du
ciel, il y a donc tous les saints, les anges, la Vierge Marie et
Jésus Christ.
Nous te prions, ô Notre
Dame, Mère de Dieu,
exaltée au dessus des choeurs des anges.
Remplis le vase de notre coeur de la grâce céleste ;
fais-nous resplendir de l'or de la sagesse;
soutiens-nous avec la puissance de ton intercession ;
orne-nous des pierres précieuses de tes vertus ;
répands sur nous l'huile de ta miséricorde,
par laquelle tu couvres la multitude de nos péchés.
Que nous soyons trouvés dignes d'être élevés à la hauteur de la
gloire céleste
et de vivre heureux pour l'éternité avec tous les bienheureux.
Nous demandons cela à Jésus Christ,
ton Fils qui en ce jour t'a exaltée au-dessus des choeurs des anges,
t'a couronnée de la couronne du royaume et t'a placée sur le trône
de la lumière éternelle.
A lui soit honneur et gloire pour les siècles éternels.
Et que toute l'Eglise chante : Amen. Alleluia !
SOURCE :
www.JesusMarie.com
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