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Les écrits d'Élisabeth de la Trinité

Contrairement à de nombreux mystiques, il ne fut pas demandé à Élisabeth de la Trinité d'écrire une autobiographie, ni même de raconter ce qui se passait dans son âme. Nous ne possédons d'elle que ses nombreuses lettres ainsi que quatre petits traités rédigés durant les trois derniers mois de sa vie. Les historiens peuvent disposer de ce qu'il est convenu d'appeler les "Lettres de jeunesse", destinées à sa famille et à des amis, ainsi que de nombreuses autres lettres dites "Lettres du Carmel". Toutes ces lettres révèlent la forte personnalité d'Élisabeth, son don total à Dieu et l'amour qui déborde de son cœur pour tous ses amis et les membres de sa famille. On découvre aussi, conformément à la spiritualité de son époque, un grand amour de la souffrance, seul moyen d'être conformé à Jésus crucifié et capable de consoler le Cœur de Jésus et de sauver les âmes.

Nous savons qu'Élisabeth souffrit beaucoup physiquement, au Carmel, à cause de sa maladie qu'à l'époque les médecins ne savaient pas soigner; mais jamais on ne découvrira la moindre plainte dans toute sa correspondance. Par contre, elle se soucie constamment des autres et parfois les conseille, mais tout en restant généralement dans un cadre très ordinaire, surtout quand elle s'adresse à des personnes non consacrées; cependant, elle laisse parfois entrevoir son désir de la conversion de ses correspondants et du développement de leur amour pour Dieu. Mais si les lettres restent généralement sur un plan très humain, ses petits traités révèlent une Élisabeth mystique et amoureuse de Dieu. Ses préoccupations concernent l'Eucharistie, le don de soi dans l'amour, et la sainte Trinité. Les quatre petits traités sont:

 

– Le Ciel dans la foi, rédigé dans la première moitié d'août 1906

– La dernière retraite, fin août 1906

– La grandeur de notre vocation, de septembre 1906

– Laisse-toi aimer, fin octobre 1906, véritable testament spirituel.

 

6-1-Le ciel dans la foi

Ce long texte est une surprise destinée à sa sœur Guite. C'est comme une retraite de dix jours ayant chacun deux oraisons. La voie à suivre, c'est l'union à Dieu; le but, se rendre conforme au Maître adoré pour atteindre la demeure de la Trinité. Dieu nous aime et nous visite par son Eucharistie, sa parole, et sa volonté manifestée par les évènements. Marie est l'exemple à suivre car Élisabeth s'adresse à une jeune maman ayant des obligations mondaines, mais qui doit toujours se souvenir que Dieu est notre Père et la Trinité notre demeure.

6-2-La dernière retraite, fin août 1906

Élisabeth de la Trinité va commencer sa dernière retraite annuelle; elle part "avec la sainte Vierge, au soir de son Assomption, afin de se préparer à la vie éternelle. À la demande de Mère Germaine, elle va noter "ses bonnes rencontres". C'est la retraite d'une malade épuisée, passant ses journées en prière, lecture, silence et repos, et qui se prépare à mourir dans des souffrances atroces. Elle témoigne de la manière dont elle envisage sa mission de louange de gloire. Elle explique les raisons de la recrudescence de sa souffrance physique; bientôt elle pourra écrire, parlant de Jésus : "Il m'a substituée à sa place sur la croix... Que faire avec sa souffrance?  Voilà que je vais me faire enseigner la conformité, l'identité avec mon Maître adoré, le Crucifié par amour... Avant d'être transformée de clarté en clarté en l'image de l'Être divin", elle devra devenir conforme à celle du Verbe incarné, Crucifié par amour. Pour cela, elle contemplera Marie, la Mère de grâce qui va former l'âme d'Élisabeth à l'image de son premier-né, le Fils de l'Éternel; elle s'imprègnera aussi, et de plus en plus, de l'Écriture. 

6-3-La grandeur de notre vocation, de septembre 1906

Il s'agit ici, non pas de sa vocation de carmélite, mais de toute vocation humaine orientée vers Dieu et son amour. Élisabeth s'adresse à son amie, plus jeune qu'elle de sept ans, Françoise de Sourdon, donc âgée de 19 ans. Françoise avait un tempérament passionné, violent, capricieux comme le fut celui d'Élisabeth: les deux femmes pouvaient donc se comprendre... Élisabeth indique que le seul idéal valable sur terre, c'est Dieu; aussi, cette méditation sera-t-elle orientée vers l'humilité: oubli de soi-même, et notre grandeur humaine quand nous marchons avec le Christ, "pour nous approcher de notre éternelle prédestination."

Ces pages ont été écrites vers le 9 septembre 1906; elle est déjà d'une "faiblesse extrême", et avoue même à sa "Framboise": "Je me crois déjà un peu au Ciel, en ma petite cellule, seule avec Lui seul, portant ma croix avec mon Maître."

6-4-Laisse-toi aimer, fin octobre 1906, véritable testament spirituel.

Ce texte: "Laisse-toi aimer", rédigé en octobre 1906, est une sorte de testament adressé à sa prieure, Mère Germaine, en signe de reconnaissance.

Nota: voir l'analyse plus complète de ces documents au chapitre 8 et au Livre 2 où est traitée la dévotion spéciale d'Élisabeth de la Trinité pour la Très Sainte Trinité.