Carthage

15e (ou 16e) concile de Carthage, commencé le 1er Mai 418.

Péché originel

222     Canon 1, Il a été décidé par tous les évêques.,. rassemblé au saint concile de Carthage : Quiconque dit qu'Adam, premier homme, a été créé mortel de telle sorte que, qu'il péchât ou non, il devait mourir corporellement, c'est-à-dire que quitter son corps ne serait pas une conséquence du péché mais une nécessité de nature, qu'il soit anathème.

223     Canon 2. Il a été décidé de même : Quiconque nie que les tout-petits doivent être baptisés, ou dit que c'est pour la rémission des péchés qu'on les baptise, mais qu'ils n'ont rien, eux du péché originel d'Adam que le bain de la régénération aurait à expier, ce qui a pour conséquence que pour eux la formule du baptême « en rémission des péchés », n'a pas un sens vrai mais faux, qu'il soit anathème. Car on ne peut pas comprendre autrement ce que dit l'Apôtre : « Par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort, et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui » Rm 5,12, sinon de la manière dont l'Église catholique répandue par toute la terre l'a toujours compris. C'est en effet à cause de cette règle de foi que même les tout-petits, qui n'ont pas pu commettre encore par eux-mêmes quelque péché, sont cependant vraiment baptisés en rémission des péchés pour que la régénération purifie en eux ce que la génération leur a apporté.

224     Canon 3. Il a été décidé de même : Quiconque dit que le Seigneur a dit « Dans la maison de mon Père il y a plusieurs demeures » Jn 14,2 pour qu'on comprenne qu'il y a dans le Royaume des cieux un certain lieu, se trouvant au milieu ou ailleurs, où vivent bienheureux les petits enfants qui ont quitté cette vie sans le baptême sans lequel ils ne peuvent pas entrer dans le Royaume des cieux qui est la vie éternelle, qu'il soit anathème. Car puisque le Seigneur dit : « A moins que quelqu'un soit rené d'eau et d'Esprit Saint, il n'entre pas dans le Royaume des cieux » Jn 3,5 : quel catholique doutera que sera un compagnon du diable celui qui n'a pas mérité d'être cohéritier du Christ ? Celui en effet qui n'est pas à droite se trouvera sans nul doute placé à gauche.

Grâce

225     Canon 3. Il a été décidé de même : Quiconque dit que la grâce de Dieu, qui justifie l'homme par notre Seigneur Jésus Christ, vaut uniquement pour la rémission des péchés déjà commis, mais non pour aider à n'en plus commettre, qu'il soit anathème.

226     Canon 4. De même : Quiconque dit que cette même grâce de Dieu par notre Seigneur Jésus Christ nous aide à ne plus pécher en ce sens seulement qu'elle nous révèle et nous ouvre l'intelligence des commandements, en sorte que nous sachions ce que nous devons désirer et ce que nous devons éviter, mais qu'elle ne nous donne nullement l'amour et la force de faire aussi ce que nous avons reconnu comme notre devoir, qu'il soit anathème. Car, puisque l'Apôtre dit : « La science enfle, mais la charité édifie » 1Co 8,1, il est très impie de croire que nous avons la grâce du Christ pour la science qui enfle et que nous ne l'avons pas pour la charité qui édifie, puisque c'est également un don de Dieu de savoir ce que nous devons faire et d'avoir l'amour pour le faire. Ainsi, la charité qui édifie empêche que la science ne nous enfle. Comme il est écrit de Dieu : « Il enseigne la science à l'homme » Ps 94,10, il est aussi écrit : « La charité vient de Dieu » 1Jn 4,7.

227     Canon 5. 11 a été décidé de même : Quiconque dit que la grâce de la justification nous est précisément donnée pour pouvoir accomplir plus facilement par elle ce que nous devons faire par notre libre arbitre, en sorte que, si la grâce n'était pas donnée, nous pourrions pourtant, quoique avec moins de facilité, observer sans elle les commandement de Dieu, qu'il soit anathème.

Lorsqu'il parle du fruit des commandements, le Seigneur ne dit pas : « Sans moi, vous pouvez le faire plus difficilement », mais : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » Jn 15,5.

228     Canon 6. Il a été décidé de même : l'apôtre saint Jean dit : « Si nous disons que nous n'avons pas de péché, nous nous abusons nous-mêmes et la vérité n'est pas en nous ». 1Jn 1,8 . Quiconque pense qu'il faut l'entendre ainsi : c'est humilité que l'on doit dire que nous avons le péché, mais non parce que c'est la vérité, qu'il soit anathème. Car l'apôtre ajoute immédiatement : « Si nous confessons nos péchés il est assez fidèle et juste pour remettre nos péchés et nous purifier de toute injustice » 1Jn 1,9. Ce passage fait suffisamment voir que cela n'est pas dit seulement par humilité mais aussi en vérité. Car l'apôtre pouvait dire : « Si disons : nous n'avons pas de péché, nous nous vantons et l'humilité n'est pas en nous » Mais en disant : « Nous nous abusons et la vérité n'est pas en nous », il montre assez que celui qui se déclare sans péché ne dit pas le vrai, mais le faux.

229     Canon 7. Il a été décidé de même : Quiconque dit que, dans la prière du Seigneur, les saints disent : « Remets-nous nos dettes » Mt 6,12 non pour eux-mêmes, puisqu'ils n'ont déjà plus besoin de faire cette demande, mais pour les autres de leur peuple qui sont pécheurs, et que c'est la raison pour laquelle chacun des saints ne dit pas : « Remets-moi mes dettes » mais « Remets-nous nos dettes » ce qui fait comprendre que le juste demande plus pour autrui que pour lui-même qu'il soit anathème. Ce saint et ce juste était l'apôtre saint Jacques, quand il disait : « Tous, nous péchons en bien des choses » Jc 3,2. Pourquoi ajouter « tous » sinon pour que le mot soit d'accord avec le Psaume où se lit : « N'entre pas en jugement avec ton serviteur. car nul vivant n'est justifié devant toi » Ps 143,2 ; et dans la prière du très sage Salomon : « Il n'y a aucun homme qui n'ait péché » 1R 8,46 et dans le livre du saint homme Job : « Il suspend l'activité des hommes, pour que tout homme reconnaisse sa faiblesse Jb 37,7 ; également le saint et juste Daniel, lorsqu'il disait au pluriel : « Nous avons péché et nous avons commis l'iniquité » Jb 9,5-15, et d'autres paroles qu'il confesse dans la vérité et l'humilité ; pour qu'on ne pense pas, comme certains le croient, qu'il parle alors non pas de ses péchés, mais plutôt de ceux de son peuple, il ajoute : « Quand... je priais et que je confessais mes péchés et les péchés de mon peuple » Jb 9,20 au Seigneur, mon Dieu, il n'a pas voulu dire « nos péchés » mais il a dit les « péchés de son peuple » et les « siens » car, prophète, il voyait par avance qu'il se trouverait des hommes qui le comprendraient bien mal.

230     Canon 8. Il a été décidé de même : Ces paroles de la prière du Seigneur où nous disons : « Remets-nous nos dettes » Mt 6,12, tous ceux qui veulent que les saints les disent par humilité et non en vérité, qu'ils soient anathèmes. Qui donc admettrait que quelqu'un qui prie mente, non seulement aux hommes, mais au Seigneur lui-même, en déclarant de ses lèvres qu'il veut qu'il lui soit pardonné, et qui dit en son coeur qu'il n'a pas de dettes à se faire remettre.

Epistula tractoria” aux Églises orientales, entre juin et août 418.

Le péché originel

231     Le Seigneur est fidèle dans ses paroles Ps 145,13, et son baptême, en sa réalité et en ses paroles, c'est-à-dire par ce qui est fait, par la confession de foi et par la vraie rémission des péchés, contient la même plénitude pour tout sexe, tout âge et toute condition de l'homme. Nul en effet ne devient libre s'il n'est esclave du péché, et ne peut être dit sauvé que celui qui auparavant était véritablement captif du péché, comme il est écrit : « Si le Fils vous a libérés, vous serez vraiment libres ». Jn 8,36. Par lui en effet nous renaissons spirituellement, par lui nous sommes crucifiés au monde. Par sa mort est déchiré ce décret de mort (voir Col 2,14) qui a été contracté par propagation, et qui a été introduit par Adam pour nous tous et transmis à toute âme - décret auquel tous ceux, sans exception, qui sont nés sont soumis avant d'être libérés par le baptême.