SPONSA
CHRISTI
CONSTITUTION
APOSTOLIQUE
PIE XII
Serviteur des
serviteurs de Dieu
pour perpétuelle mémoire
Épouse du Christ,
l'Église
,
dès les tout premiers débuts de son histoire, a manifesté par des
actes et des témoignages multiples et confirmé par des documents
éclatants les sentiments d'estime et d'amour maternels qu'elle
nourrissait à l'égard des vierges consacrées à Dieu
.
Cela d'ailleurs n'a
rien d'étonnant. Les vierges chrétiennes sont en effet « la plus
noble partie du troupeau du Christ »
.
Poussées par la charité, repoussant comme indignes toutes les
sollicitudes du monde
,
écartant victorieusement le partage facile, mais très dangereux, du
cœur,
non seulement elles se vouent
tout entières au Christ, comme au véritable Époux
des âmes, mais elles consacrent pour toujours leur vie entière ornée
des pierres précieuses de toutes les vertus chrétiennes
au service du Christ et de l'Église
.
Cette appartenance ou
aliénation mystique des vierges au Christ et leur donation à
l'Église s'accomplissaient aux premiers siècles du christianisme
spontanément, plutôt par des actes que par des paroles. Dans la
suite, les vierges formèrent non seulement une classe, mais un état
de vie déjà défini et un Ordre approuvé par l'Église
.
Alors la profession de virginité commença à se faire publiquement et
à être ainsi garantie par un lien chaque jour plus étroit
.
Ensuite l'Église, quand elle acceptait le vœu sacré ou l'engagement
de virginité, consacrait la vierge comme une personne vouée
inviolablement à Dieu et à l'Église, par une cérémonie solennelle
qui, à juste titre, est comptée parmi les plus beaux monuments de
l'ancienne liturgie
;
l'Église distinguait clairement cette vierge des autres personnes
qui ne se vouaient à Dieu que par des vœux ou des engagements privés
.
La profession de la vie
virginale était placée sous la garde d'une ascèse vigilante et
vigoureuse; en même temps elle était nourrie et favorisée par tous
les exercices de piété et de la pratique des vertus. La doctrine des
anciens Pères, tant grecs et autres orientaux, que latins, présente
et place sous nos yeux une image fidèle, certes, mais très belle, de
la vierge chrétienne. Dans leurs écrits, tout ce qui peut concerner
la sainteté virginale et la perfection intérieure et extérieure est
décrit avec le plus grand soin, un grand amour, d'une façon
expressive et claire
.
Jusqu'à quel point la
vie angélique des vierges chrétiennes a été conforme, en cette
première époque de son histoire, aux exhortations et aux
descriptions des Pères de l'Église, et de quelles héroïques vertus
elle nous paraît richement parée, nous le savons, d'une part,
directement et par une voie sûre, par les documents et les monuments
historiques, et, d'autre part, il nous est permis de le conjecturer,
bien plus de le déduire, sans aucun doute, d'autre sources
authentiques elles aussi
.
Surtout après que la
paix eut été accordée aux chrétiens, à la suite des ermites et des
cénobites, les vierges consacrées à Dieu prirent l'habitude de
perfectionner et de fortifier leur état de vie par une profession
explicite et sanctionnée des conseils de pauvreté et d'une plus
stricte obéissance
.
Les femmes ayant fait
profession de virginité, qui déjà auparavant se réunissaient pour
mener une vie commune, séparée autant que possible du commerce des
hommes, et cela soit par amour de la solitude, soit pour se mettre à
l'abri des très graves dangers qui, dans la société romaine
corrompue, les menaçaient de toutes parts, suivirent assez tôt
l'exemple de l'immense multitude des cénobites; elles laissèrent en
général aux hommes la vie érémitique, elles imitèrent la vie
cénobitique et presque toutes s'y adonnèrent
.
L'Église recommandait
en général aux vierges la vie commune entendue dans un sens assez
large: pendant longtemps elle ne voulut pas imposer strictement la
vie monastique, pas même aux vierges consacrées qu'elle laissa dans
le monde, honorées comme il convenait, mais libres cependant.
Cependant, le nombre de vierges consacrées par les cérémonies
liturgiques habitant dans leurs maisons particulières ou menant une
vie commune assez large diminuait de plus en plus; enfin, elles
finirent par disparaître, en plusieurs endroits par décision
juridique, partout en fait. Bien plus, en général, elles ne furent
pas rétablies, plus récemment elles furent même interdites
.
En cet état de choses,
l'Église tourna sa maternelle sollicitude spécialement vers ces
vierges qui, choisissant la meilleure part
,
abandonnaient complètement le monde et embrassaient dans sa
plénitude, dans les monastères, la vie chrétienne parfaite, ajoutant
à la profession de la virginité la stricte pauvreté et l'obéissance
totale. Leur profession ou leur vie cénobitique fut protégée par
l'Église extérieurement, selon la prudence, par les lois de jour en
jour plus sévères de la clôture
.
A l'intérieur, elle organisa le genre de vie de ces vierges de façon
à former, peu à peu, avec netteté et clarté dans sa législation et
dans l'ascèse religieuse, le type de la moniale (sanctimonialis),
toute consacrée, sous la rude discipline de la règle, à la vie
contemplative
.
Vers le début du moyen
âge, après la complète disparition du genre de vie des vierges
consacrées vivant dans le monde, les moniales, s'étant
extraordinairement développées par le nombre, la ferveur, la
diversité, furent seules considérées comme les héritières in
solidum et les successeurs légitimes des vierges qui les avaient
précédées
.
Elles furent non seulement héritières et successeurs, mais elles
administrèrent fidèlement le patrimoine reçu, le firent valoir avec
soin, ayant reçu cinq talents, elles en gagnèrent cinq autres
.
Les monuments liturgiques, les documents canoniques, les témoignages
historiques de tout genre, les écrits, les sculptures, les peintures
établissent et prouvent cette origine et cette dignité, ces mérites
et cette sainteté des moniales
.
Plusieurs siècles
durant et jusqu'à la fin du moyen âge — comme il ressort clairement
des Décrétales et même de tout le Corpus du droit canonique —, les
moniales furent les seules parmi les femmes à mener avec les Moines
et les Chanoines Réguliers l'état de perfection, qui déjà avait été
solennellement reçu et pleinement reconnu, afin de lui donner plus
parfaitement un caractère officiel
.
Puis, non sans avoir
surmonté de nombreuses et graves difficultés, d'abord tous les
Frères, désignés sous le nom de Mendiants, d'Hospitaliers, de
Rédempteurs ou par une autre appellation, et, environ trois siècles
plus tard, les Clercs dits Réguliers, furent, eux aussi, comptés
parmi les vrais religieux et réguliers, avec les Moines et les
Chanoines Réguliers. Mais toutes les Moniales, tant celles qui
suivaient la vie monastique ancienne ou la vie canoniale, que celles
qui formaient les seconds Ordres des Frères Mendiants, en ce qui
concerne le droit canonique, suivaient l'unique, noble et ancienne
institution et embrassaient la même forme de vie religieuse
.
Donc, jusqu'aux
premières Congrégations de femmes qui naquirent au XVI ou XVII
siècle, étaient seulement considérées comme Moniales celles qui, en
fait, et en droit, professaient légitimement la vie religieuse. Bien
plus, après avoir toléré et, avec le temps, accordé aux
Congrégations une reconnaissance d'abord de fait et ensuite de droit
administratif
,
ce sont les Moniales seules, jusqu'à la promulgation du Code de
droit canonique, qu'on admettait, en droit strict, comme véritables
religieuses et régulières
.
Si quelqu'un veut ici
tourner un regard vers les secrets de la vie monastique, comment
pourra-t-il nombrer et peser les trésors de perfection religieuse
cachés dans les monastères? Les fleurs et les fruits de sainteté que
ces jardins fermés ont produits pour le Christ et son Église;
l'influence des prières, les richesses de dévouement, les biens de
tout genre enfin par lesquels les Moniales, au prix de beaucoup
d'efforts, ont embelli, soutenu, consolé leur Mère, la sainte
Église ?
Le type austère et bien
défini des religieuses Moniales, gravé dans les textes des lois
canoniques et ascétiques, fut facilement et, quant à ses principaux
traits, même fidèlement accepté par les innombrables Ordres,
monastères, couvents, qui ont toujours existé dans l'Église, et
pendant plusieurs siècles il fut maintenu avec ténacité. Cette
fidélité commune et cette constance procurèrent à l'institution
sacrée des Moniales une unité qui résista toujours fortement à
n'importe quelles innovation, avec plus de vigueur que tous les
autres Instituts de Réguliers ou de religieux de l'un et l'autre
sexes. C'est un mérite que, en de justes limites, on ne doit pas
hésiter à lui attribuer.
Cette unité des
Moniales, que Nous venons de louer, n'a d'ailleurs pas été un
obstacle à ce que, tant en ce qui concerne la vie ascétique que la
discipline interne, des formes diverses et des variations fussent
admises dès les temps anciens; admirable dans ses saints, Dieu
enrichissait ainsi et embellissait l'Église, son Épouse.
Ces variétés de
Moniales paraissent résulter de la variété de même genre des Ordres
et des Religions d'hommes, auxquels les Ordres de Moniales furent en
quelque sorte rattachés. En effet, presque tous les moines, les
Chanoines Réguliers, principalement les Mendiants, s'efforcèrent de
fonder des seconds Ordres qui, en respectant toujours le caractère
de Moniales, paraissaient se distinguer les uns des autres comme se
distinguaient les premiers Ordres. De la même façon, plusieurs
Ordres de Chanoines Réguliers et plusieurs Congrégations d'hommes
fondèrent plus récemment des Ordres de Moniales correspondant à leur
propre Institut.
Les variétés de
Moniales dont Nous venons de parler, que Nous considérions soit
l'histoire de l'Institution, soit ses changements internes communs,
sont tout à fait dignes d'être examinées avec attention.
Certainement, tout en sauvegardant la forme générale de la vie
contemplative et en maintenant fermement en vigueur les normes
principales et les principes de la discipline existante, elles ont
apporté à l'antique institution comme une nouvelle énergie pour la
sainteté.
Aux époques plus
récents, spécialement à la fin du XVI siècle, de nouveaux Ordres de
Moniales furent fondés et approuvés peu à peu par l'Église; par
exemple les Instituts de Ste-Ursule, de Ste-Angèle, la Congrégation
des religieuses de Notre-Dame, l'Ordre de la Visitation, la Société
Notre-Dame, les Moniales de Ste-Marie de la Charité
et plusieurs autres nouvelles fondations, forcées ou moralement
obligées d'accepter, dès leur origine ou plus tard, le droit commun
en vigueur pour les Moniales, si elles voulaient professer une
véritable vie religieuse, la seule alors reconnue pour les femmes,
préparaient de diverses façons un renouvellement du droit lui-même.
Ces nouvelles formes de
Moniales, même si elles professaient la vie contemplative canonique
et avaient enfin accepté, non sans difficulté mais avec sincérité,
la clôture pontificale adaptée à leur genre de vie particulier pour
se conformer aux opinions alors courantes, n'acceptèrent pas
toutefois, en certains cas, la récitation de l'office divin. Avec un
zèle louable, elles-mêmes regardèrent comme des devoirs de leur
profession de nombreuses oeuvres d'apostolat et de charité qui leur
paraissaient convenir à leur sexe et à leur statut juridique.
Au cours des années,
soit à l'exemple des Ordres nouveaux, soit du fait du développement
des Congrégations et des Sociétés qui s'efforçaient d'unir à la vie
de perfection la pratique féconde de la charité, de l'assistance, de
l'éducation, soit enfin par suite de l'évolution commune en tout
genre des choses et des idées, bien des monastères d'un grand nombre
d'Ordres qui, institutionnellement, suivaient uniquement la vie
contemplative, admirent en bien des lieux, avec l'approbation et
sous la direction prudente du Saint-Siège, les oeuvres d'apostolat
.
De là, peu à peu,
insensiblement, il arriva que l'institution des Moniales, dans son
ensemble, présentait non seulement des Ordres différents par leurs
Règles et leurs Constitutions, mais encore qu'une division plus
profonde s'y introduisait, à savoir, entre les monastères et les
Ordres qui suivaient seulement la vie contemplative et ceux où l'on
joignait à la vie contemplative des oeuvres d'apostolat
canoniquement approuvées, soit en vertu d'une disposition
particulière des constitutions, soit du fait des concessions du
Saint-Siège obtenues dans la suite.
A notre époque, toute
l'institution des Moniales, tant dans les Ordres et monastères qui
jusque là avaient mené fidèlement la vie contemplative seulement,
que chez ceux surtout qui, par décision de l'Église, unissaient
harmonieusement la vie contemplative avec les oeuvres d'apostolat,
se ressentit grandement de l'évolution et de la diversité des
événements et des circonstances. Assurément, comme ces Ordres
s'adonnent à des oeuvres similaires d'éducation et de la charité
qui, du fait des habitudes qui se généralisent ou de l'intervention
des pouvoirs publics, s'exercent alors de telle façon qu'elles en
deviennent à peine compatibles ou tout à fait incompatibles avec
certaines dispositions classiques de la clôture pontificale, ces
règles de la clôture, tout en maintenant le caractère général, ont
dû sagement être mitigées de façon à pouvoir s'harmoniser avec les
oeuvres. Ainsi semblait le réclamer l'utilité de la sainte Église et
des âmes, puisque, si on n'avait point agi de la sorte, ces oeuvres
n'auraient pu être entreprises ou du moins ne l'auraient pas été de
la même façon. Et ce n'est pas seulement à l'égard des Ordres
apostoliques, mais encore à l'égard des Ordres purement
contemplatifs que les circonstances des temps et la grande pauvreté
dont souvent ils souffraient ont paru exiger et imposer quelquefois
des aménagements ou des interprétations plus larges.
Aujourd'hui, à titre
d'exemple, le sentiment public qu'on appelle social supporterait
difficilement une interprétation trop stricte du canon 601, même
lorsqu'il s'agit des Moniales contemplatives. Aussi le Saint-Siège
se montre-t-il de plus en plus disposé à pourvoir paternellement à
bien des besoins et des nécessités qui autrefois ne paraissaient pas
assez graves, d'après l'estimation commune, pour justifier une
violation ou une exemption de la clôture pontificale. Du reste,
l'inviolabilité et le respect du domicile, qui n'était pas sans
doute l'unique raison de la clôture pontificale, mais qui, variant
avec les circonstances des époques s'ajoutait aux autres motifs de
l'imposer et de la régler, est aujourd'hui plus respectée et assurée
qu'autrefois.
En résumé, après avoir
exposé l'origine de la sainte institution des Moniales, Nous
estimons utile, à présent, d'en bien distinguer les éléments propres
et nécessaires qui affectent directement la vie contemplative des
Moniales comme leur fin première et principale. A côté de ces traits
originels et essentiels qui dessinent clairement, en droit, la forme
canonique des Moniales, s'en ajoutent d'autres d'une assez grande
importance qui, sans être indispensables, la complètent cependant,
puisque ils répondent assez exactement à la fin générale des
Moniales et concourent à l'assurer. Certains traits, au contraire,
se trouvent dans l'institution des Moniales, qui ne sont pas
nécessaires à cette fin et ne la complètent pas, mais ne sont
qu'extrinsèques et historiques; c'est-à-dire qui proviennent, à coup
sûr, des circonstances du temps passé; et celles-ci ont bien changé.
Si ces éléments ne servent plus ou s'ils peuvent empêcher un plus
grand bien, on ne voit aucune raison spéciale de les maintenir.
Aussi, tout en
maintenant entièrement les éléments originels et essentiels de la
vénérable institution des Moniales, Nous avons décidé, à l'égard des
autres éléments qu'on estime externes et adventices, de leur
apporter avec sagesse et prudence des ajustements aux circonstances
actuelles, qui pourront donner à cette institution non seulement un
plus grand éclat, mais encore une efficacité plus complète.
Nous sommes entraîné et
même contraint à apporter ces ajustements raisonnables à
l'institution des Moniales, par les renseignements que Nous recevons
de toutes les parties du monde, et qui Nous font connaître avec
certitude la grande détresse dans laquelle se trouvent souvent, pour
ne pas dire toujours, les Moniales. Oui, il y a de nombreux
monastères qui, hélas! meurent presque de faim, de misère, de
privations; il y en a beaucoup d'autres qui, par suite de
difficultés matérielles, mènent une vie pénible et la plupart du
temps impossible à supporter. Il y a en outre des monastères qui,
sans vivre dans le besoin, cependant, du fait qu'ils sont séparés et
isolés de tout autre monastère, souvent dépérissent. De plus, les
lois trop strictes de la clôture amènent souvent de grandes
difficultés. Enfin, les nécessités de l'Église et des âmes croissent
toujours et réclament le concours de tous pour y porter une aide
urgente et multiple; il semble que le moment soit venu de concilier
la vie monastique en général, même chez les Moniales consacrées à la
contemplation, avec une participation mesurée à l'apostolat.
Notre jugement sur ce
point a été bien souvent confirmé par les témoignages des Ordinaires
des lieux et des Supérieurs religieux, qui Nous sont parvenus de
plusieurs pays avec une parfaite unanimité.
Parmi les décisions qui
sont indiquées ci-après dans les statuts généraux des Moniales, il
est bon d'en expliquer quelques-unes, afin que Nous énoncions les
règles et les principes qui permettront de comprendre facilement,
sûrement et correctement, chacune de ces prescriptions. Et tout
d'abord ,en ce qui concerne la vie contemplative des Moniales, ceci
qui a toujours été en vigueur, suivant l'esprit de l'Église, doit
être maintenu ferme et intact: tous les monastères de Moniales
doivent toujours et partout professer régulièrement la vie
contemplative comme leur première et principale fin. C'est pourquoi
il faut que les travaux et ministères auxquels les Moniales peuvent
et doivent se livrer soient de telle nature et disposés et réglés de
telle façon pour le lieu, le temps, la mesure et la manière, que la
vie vraiment et sincèrement contemplative de toute la communauté,
comme de chacune des Moniales, soit non seulement sauvegardée, mais
encore constamment nourrie et fortifiée.
Des prescriptions et
concessions ont été données autrefois, sous la pression des
circonstances, pour quelques régions, d'après lesquelles les vœux
solennels étaient commués en vœux simples. Elles comportent
certainement l'octroi d'une dispense « odieuse », et d'autant plus «
odieuse » que ce privilège s'oppose à la prérogative principale des
Moniales; car les vœux solennels qui entraînent une consécration à
Dieu plus complète et plus étroite que les autres vœux publics,
représentent la marque canoniquement indispensable et principale
pour les Ordres. C'est pourquoi, comme il est établi par une longue
expérience faite en divers pays que les vœux solennels, soit des
Réguliers, soit des Moniales, bien qu'ignorés par le droit civil,
peuvent facilement et sans embarras être observés, et que la
sécurité des autres biens de la communauté peut être convenablement
assurée par d'autres moyens, même si la personnalité juridique,
comme cela arrive ici ou là, est refusée aux Ordres et aux
monastères, la législation et l'action du Saint-Siège s'accordent
,
depuis déjà de nombreuses années, à restreindre ces exceptions
« odieuses » dont Nous venons de parler et, autant que possible, à
les supprimer. Et, en effet, les Moniales ne doivent pas être
privées de l'honneur, du mérite et de la joie d'émettre des vœux
solennels qui leur sont propres.
Pour assurer une
meilleure garde du vœu solennel de chasteté et de la vie
contemplative, et pour maintenir le jardin fermé des Moniales à
l'abri de tous les assauts du monde, qu'aucune ruse, aucun attentat
ne puissent le violer, nul contact séculier ou profane le troubler,
mais qu'il demeure le vrai cloître des âmes
,
dans lequel les Moniales puissent servir Dieu plus librement
,
l'Église, dans sa sollicitude sage et vigilante, établit une clôture
plus sévère, comme une institution spéciale des Moniales, la régla
avec soin et la munit pour toujours de graves sanctions
pontificales. Cette vénérable clôture des Moniales qui, du fait de
l'autorité suprême d'où elle émane et des sanctions qui la protègent
intérieurement et extérieurement, s'appelle pontificale, non
seulement Notre présente Constitution, eu égard aux diverses
circonstances des monastères qui, jusqu'à maintenant, y sont soumis,
la confirme délibérément et solennellement, mais encore l'étend avec
prudence à ces monastères qui, jusqu'ici, en vertu de dispenses
légitimes, n'y sont pas obligés.
Les monastères qui
professent la vie uniquement contemplative et que n'admettent pas,
dans l'enceinte de la maison religieuse, des oeuvres stables
d'éducation, de charité, de récollection, ou d'autres du même genre,
conserveront ou institueront la clôture pontificale dont il est
question aux canons 600-602 du Code et qu'on appellera majeure.
Pour ces monastères
qui, soit par leur règle, soit en vertu des légitimes décisions du
Saint-Siège, unissent à la vie contemplative, dans les locaux mêmes
du monastère, l'exercice de certains ministères qui s'harmonisent
avec elle, la clôture pontificale, tout en gardant ce qui lui est
nécessaire et essentiel, est tempérée pour les choses qui ne peuvent
que difficilement et à peine être observées? Pour les autres choses
qui ne semblent pas tellement indispensables pour la clôture
pontificale du Code (can. 599, 604, § 2), elle est convenablement
complétée. Cette clôture pontificale, tempérée et ajustée aux
nécessités actuelles, pour la distinguer de l'ancienne, plus sévère,
sera appelée mineure; elle pourra être accordée même aux
monastères qui, tout en pratiquant la vie uniquement contemplative,
n'ont pas cependant les vœux solennels ou manquent de certaines
conditions qui sont requises avec raison par la jurisprudence ou le
style usité de la Curie pour la clôture pontificale majeure. Une
définition précise de tous ces éléments de la clôture pontificale
mineure sera donnée ci-dessous dans les statuts généraux et dans les
instructions que la Sacrée Congrégation des Religieux fournira en
vertu de Notre autorité et en Notre nom.
A l'égard de
l'autonomie des monastères de Moniales ou de leur liberté mutuelle,
Nous jugeons utile de redire ici et d'appliquer aux Moniales ce que
Nous avons dit à dessein au sujet des Moines, dans l'Homélie
prononcée le 18 septembre 1947, dans la basilique patriarcale de
St-Paul-hors-les-Murs, au terme du XIV centenaire de la mort de
saint Benoît de Nursie
.
Les circonstances ayant changé, beaucoup de choses conseillent et
même souvent demandent une association des monastères de Moniales,
afin de faciliter et d'adapter la distribution des charges, la
translation temporaire, utile et souvent nécessaire des religieuses
d'un monastère à un autre pour différentes causes, l'aide
économique, la coordination des travaux, la protection de la commune
observance, et d'autres choses du même genre. Tout cela peut se
faire et être obtenu sans dérogation à l'autonomie nécessaire, ni
sans dommage quelconque pour la sévérité de la clôture, ni pour le
recueillement, ni pour la discipline rigoureuse de la vie
monastique. Nous en avons des preuves certaines et sérieuses dans la
riche expérience des Congrégations monastiques d'hommes autant que
dans les nombreux exemples d'union et de fédérations entre les
Moniales qui ont été déjà approuvées. D'ailleurs, l'érection des
fédérations et l'approbation des statuts qui doivent les régir
demeureront réservées au Saint-Siège.
Pour le travail manuel
ou intellectuel, tous ceux, hommes ou femmes sans exception, qui se
livrent à la vie contemplative, y sont obligés non seulement par la
loi naturelle
,
mais encore par un devoir de pénitence et de satisfaction
.
Le travail, en outre, est généralement le moyen par lequel l'âme est
gardée des dangers et s'élève vers les hauteurs; par lequel, comme
il le faut, nous apportons notre collaboration à la divine
Providence, tant dans l'ordre naturel que dans l'ordre qui surpasse
la nature; par quoi on exerce les oeuvres de charité. Le travail,
enfin, est la règle et la loi principale de la vie religieuse, même
depuis ses origines, comme il est dit: « Prie et travaille ».
Certainement, la discipline de la vie religieuse a reposé toujours
en grande partie sur le précepte du travail, son organisation et son
accomplissement
.
Le travail des
Moniales, vu sous l'angle de l'éternité, doit être tel que d'abord
celle qui l'entreprend le fasse dans une sainte intention, en
pensant souvent à la présence de Dieu; qu'elle l'accepte par
obéissance et qu'elle y joigne volontairement sa mortification
personnelle. Le travail ainsi accompli sera un exercice constant de
toutes les vertus et un gage de la suave et efficace union de la vie
contemplative avec la vie active, à l'exemple de la famille de
Nazareth
.
Si l'on juge le travail
monastique, par rapport à sa nature ou à sa discipline, d'après les
Règles, les Constitutions et les coutumes traditionnelles de chaque
Ordre, il doit être proportionné avec les forces des Moniales et
même ainsi organisé et accompli que, suivant le temps et les
circonstances, il puisse fournir aux Moniales l'entretien nécessaire
et se montrer utile à l'Église, à la société humaine et aux pauvres
.
La perfection de la vie
chrétienne reposant spécialement sur la charité
,
et la charité, par laquelle nous devons aimer uniquement le Seigneur
par-dessus toutes choses et tous les autres en lui-même, étant
vraiment une et la même, notre Mère l'Église exige de toutes les
Moniales qui professent canoniquement la vie contemplative, en même
temps que l'amour parfait de Dieu, la charité parfaite envers le
prochain; et en vertu de cette charité et de leur état, les
religieux et les religieuses doivent se sentir tout dévoués à
l'Église et aux nécessités de tous les pauvres.
Par conséquent, toutes
les Moniales doivent bien savoir que leur vocation est pleinement et
complètement apostolique
,
sans limites de lieux, de temps ou de choses, qu'elle s'étend
partout et toujours à tout ce qui regarde, d'une façon ou d'une
autre, l'honneur de leur Époux ou le salut des âmes. Cette vocation
universellement apostolique des Moniales n'empêche aucunement les
monastères de recommander à Dieu par leur prières les besoins de
toute l'Église, des groupes et de chacun des hommes.
L'apostolat général de
toutes les Moniales, par lequel elles doivent être jalouses de
l'honneur de leur Époux divin
,
et promouvoir le bien de toute l'Église et de tous les fidèles,
utilise principalement ces trois moyens :
1. L'exemple de la
perfection chrétienne par leur vie qui, même sans paroles, entraîne
les fidèles profondément et constamment vers le Christ et vers la
perfection chrétienne et, comme un étendard, encourage et attire les
bons soldats du Christ
au bon combat et à la victoire
.
2. La prière, en
l'offrant à Dieu, soit publiquement au nom de l'Église
solennellement sept fois par jour aux heures canoniques, soit en
privé sous toutes les formes avec persévérance.
3. Le zèle pour se
dévouer, en ajoutant aux mortifications qui naissent de la vie
commune et de la fidèle observance de la règle, d'autres exercices
d'abnégation personnelle prescrits par la Règle ou embrassés tout à
fait volontairement afin de compléter ainsi généreusement « ce qui
manque aux souffrances du Christ Jésus, pour son corps qui est
l'Église »
.
Après avoir rappelé les
faits historiques de l'Institution des Moniales et décrit avec soin
dans quelles limites elle peut s'ajuster aux nécessités actuelles de
la vie, Nous pensons maintenant à donner des règles générales selon
lesquelles cette accommodation doit se réaliser. La Sacrée
Congrégation des Religieux appliquera la Constitution et les statuts
généraux en ce qui concerne les fédérations de monastères déjà
faites ou qui sont à faire et pour chaque monastère. En vertu de
Notre autorité, elle pourra, par le moyen d'instructions,
déclarations, réponses et autres documents du même genre, achever
tout ce qui se rapporte à l'application exacte et efficace de la
Constitution et à l'obéissance prompte et fidèle aux statuts
généraux.
STATUS
GENERAUX DES MONIALES
Art. I
§ 1. Sous le nom de
Moniales, dans cette Constitution, conformément au Droit (c. 488,
7), sont comprises, outre les religieuses à vœux solennels,
également celles qui ont fait les vœux simples, perpétuels ou
temporaires, dans des monastères où les vœux solennels sont
prononcés actuellement ou devraient l'être en vertu de la fondation;
à moins que le contexte ou la nature de la chose n'établisse
clairement le contraire.
§ 2. Ne s'opposent
nullement à l'appellation légitime de Moniales (c. 488, 7) et à
l'application de la législation des Moniales: 1° la profession
simple émise légitimement dans les monastères (§ 1); 2° la
clôture pontificale mineure prescrite aux monastères ou
régulièrement concédée; 3° l'exercice des oeuvres d'apostolat
qui est joint à la vie contemplative, soit d'après les Constitutions
approuvées et confirmées par le Saint-Siège pour certains Ordres,
soit par une prescription légitime du Saint-Siège ou en vertu d'une
concession faite à plusieurs monastères.
§ 3. Cette Constitution
apostolique ne concerne pas, au point de vue juridique: 1° Les
Congrégations religieuses (c. 488, 2) et les Sœurs qui en font
partie (c. 488, 7) et d'après leur Institution ne prononcent que des
vœux simples; 2° les sociétés de femmes qui vivent en commun à la
façon des religieuses et leurs membres (c. 673).
Art. II
§ 1. La forme spéciale
de vie religieuse monastique que les Moniales doivent fidèlement
mener sous une discipline régulière rigoureuse et à laquelle
l'Église les destine, c'est la vie contemplative canonique.
§ 2. Sous le nom de vie
contemplative canonique, on entend non pas cette vie intérieure et
théologale à laquelle toutes les âmes vivant dans les Instituts
religieux et même dans le monde sont appelées et que chacune peut
mener partout en elle-même, mais une profession extérieure de
discipline religieuse qui, soit par la clôture, soit par les
exercices de piété, d'oraison et de mortification, soit enfin par
les travaux auxquels les Moniales doivent vaquer, est ordonnée à la
contemplation intérieure de telle sorte que toute la vie et toute
l'activité puissent facilement et doivent efficacement être
pénétrées de sa recherche.
§ 3. Si la vie
contemplative canonique sous la discipline régulière rigoureuse ne
peut être habituellement observée, le caractère monastique ne peut
être ni concédé, ni conservé au cas où on le possède déjà.
Art. III
§ 1. Les vœux religieux
solennels, prononcés par toutes les religieuses du monastère ou du
moins par une catégorie d'entre elles, constituent la note
principale grâce à laquelle les monastères de femmes sont
juridiquement comptés non parmi les Congrégations religieuses, mais
parmi les Ordres réguliers (c. 488, 2). Dans ces monastères, toutes
les religieuses professes sont, dans le Droit, conformément au canon
490, comprises sous la dénomination de Régulières, et leur nom
propre n'est pas celui de Sœurs, mais de Moniales (c. 488, 7).
§ 2. Tous les
monastères dans lesquels on ne prononce que des vœux simples
pourront demander la reprise des vœux solennels. Bien plus, à moins
qu'il n'y ait de très graves motifs qui s'y opposent, ils auront
soin de reprendre de nouveau ces vœux solennels.
§ 3. Les formules
anciennes solennelles de consécration des vierges qui se trouvent
dans le pontifical romain sont réservées aux Moniales.
Art. IV
§ 1. La clôture plus
rigoureuse, dite pontificale, des Moniales, en lui conservant
toujours et pour tous les monastères les caractéristiques qui lui
sont comme naturelles, comprendra à l'avenir deux espèces : la
clôture majeure et la clôture mineure.
§ 2. - 1. La clôture
pontificale majeure, c'est-à-dire celle qui est décrite dans le
Code (canons 600-602), Nous la confirmons pleinement par Notre
présente Constitution apostolique. La Sacrée Congrégation des
Religieux, agissant en vertu de Notre autorité, indiquera les
raisons pour lesquelles la dispense de la clôture majeure peut être
accordée, afin que, sauvegardant la nature de la clôture, on puisse
cependant l'adapter plus convenablement à la situation de notre
temps.
2. La clôture
pontificale majeure, le paragraphe 3, N. 3 étant respecté, doit
être, selon la règle, en vigueur dans tous les monastères qui mènent
exclusivement la vie contemplative.
§ 3. - 1. La clôture
pontificale mineure retiendra de l'ancienne clôture des Moniales
et protégera par ses sanctions tout ce qui est expressément défini
comme nécessaire dans les instructions du Saint-Siège en vue de
conserver et de protéger la forme naturelle de cette clôture.
2. A cette clôture
papale mineure sont soumis les monastères de Moniales à vœux
solennels qui, soit d'après leur Institution, soit en vertu d'une
concession légitime, s'emploient à des occupations mettant en
contact avec des personnes étrangères, de telle façon que plusieurs
religieuses et une notable partie de la maison s'adonnent
habituellement à ces travaux ou fonctions.
3. Pareillement, tous
et chacun des monastères où, tout en se livrant uniquement à la
contemplation, on ne prononce que des vœux simples, doivent être au
moins soumis aux prescriptions de cette clôture.
§ 4. - 1. Il faut
regarder la clôture pontificale majeure ou mineure comme une
conditions nécessaire, non seulement pour qu'on puisse émettre des
vœux solennels (§ 2), mais aussi pour que les monastères dans
lesquels on émet des vœux simples (§ 3) puissent être considérés à
l'avenir comme de vrais monastères de Moniales conformément au canon
488, 7.
2. Si les règles de la
clôture pontificale, au moins de la clôture mineure, ne peuvent être
ordinairement observées, on doit supprimer les vœux solennels si on
les a dans ce monastère.
§ 5. - 1. La clôture
pontificale mineure, surtout en ce qui regarde les notes
caractéristiques qui la distinguent de la clôture des Congrégations
ou des Ordres masculins, doit être observée dans les lieux où les
Moniales ne prononcent pas de vœux solennels.
2. Si dans un monastère
on se rend compte d'une façon certaine que la clôture au moins
mineure ne peut pas être habituellement observée, ce monastère devra
être transformé en une maison religieuse de Congrégation ou de
Société.
Art. V
§ 1. Parmi les femmes
consacrées à Dieu, l'Église ne délègue, pour adresser à Dieu, en son
nom, soit au chœur (c. 610, § 1), soit en particulier (c. 610, § 3),
la prière publique, que les seules Moniales. Elle les oblige, par
une obligation grave, en vertu de la règle, conformément à leurs
Constitutions, à s'acquitter chaque jour de cette prière par la
récitation des heures canoniales.
§ 2. Tous les
monastères de Moniales et chacune des Moniales professes de vœux
solennels ou de vœux simples partout sont ténus de réciter l'Office
divin au chœur, conformément au canon 610, § 1, et à leurs
Constitutions.
§ 3. D'après le canon
610, § 3, les Moniales, non professes de vœux solennels, qui ont été
absentes du chœur, ne sont pas tenues strictement, à moins d'une
prescription expresse de leurs Constitutions (c. 578, 2), à la
récitation privée des heures canoniales: cependant, comme Nous
l'avons dit ci-dessus (art. 4), non seulement la pensée de l'Église
est que l'on reprenne partout chez les Moniales les vœux solennels,
mais encore, si provisoirement cette reprise ne peut se réaliser,
que les Moniales professes à vœux simples perpétuels à la place des
vœux solennels s'acquittent fidèlement de la tâche de la récitation
de l'office divin.
§ 4. Dans tous les
monastères, la messe conventuelle correspondant à l'office du jour
doit être, conformément aux rubriques, célébrée autant que faire se
peut (c. 610, § 2).
Art. VI
§ 1. - 1. Les
monastères de Moniales, à la différence des autres maisons
religieuses de femmes, sont, en vertu du Code et selon ses
dispositions, sui juris (c. 488, 8).
2. Les supérieures de
chaque monastère de Moniales sont de droit Supérieures majeures et
possèdent tous les pouvoirs qui appartiennent aux Supérieurs majeurs
(c. 488, 8), à moins que, de par le contexte ou la nature des
choses, certains de ces pouvoirs ne concernent que les hommes (c.
490).
§ 2. - 1. L'étendue ou
le champ de cette condition sui juris ou, comme on l'appelle
d'autonomie des monastères de Moniales, est fixée par le droit
commun et par le droit particulier.
2. La tutelle juridique
que le droit accorde soit aux Ordinaires des lieux, soit aux
Supérieurs réguliers sur chaque monastère, ne subit aucune
dérogation ni du fait de cette Constitution, ni du fait des
Fédérations de monastères permises par la Constitution (art. 7) et
introduites par son autorité.
3. Les rapports
juridiques de chaque monastère avec les Ordinaires des lieux ou les
Supérieurs réguliers continueront à être réglés par les dispositions
du droit commun et du droit particulier.
§ 3. Par cette
Constitution, il n'est nullement indiqué si chaque monastère est
sous la dépendance de l'Ordinaire du lieu, ou bien si, dans les
limites du Droit, il est exempt de cette dépendance et soumis à un
Supérieur régulier.
Art. VII
§ 1. Les monastères de
Moniales non seulement sont sui juris ou autonomes (c. 488,
8), mais aussi juridiquement distincts et indépendants les uns des
autres; ils ne sont unis et rattachés entre eux que par des liens
spirituels et moraux, même s'ils sont soumis de par le Droit au même
premier Ordre ou Religion.
§ 2. - 1. Cette
indépendance mutuelle des monastères, plutôt admise en fait
qu'imposée par le Droit n'est nullement contredite par la
constitution des Fédérations de monastères. On ne doit pas
considérer ces dernières comme interdites par le Droit ou comme
moins harmonisées de quelque façon à la nature et aux fins de la vie
religieuse des Moniales.
2. Aucune règle
générale ne prescrit d'établir des Fédérations de monastères.
Cependant, ces Fédérations sont très recommandées par le Siège
apostolique tant pour prévenir les maux et les inconvénients que la
séparation complète peut causer que pour favoriser l'observance
régulière et la vie contemplative.
§ 3. L'établissement de
n'importe quelle forme de Fédération ou de Confédération des
monastères de Moniales est réservé au Saint-Siège.
§ 4. Toute Fédération
ou Confédération de monastères doit nécessairement être organisée et
régie par ses lois propres, approuvées par le Saint-Siège.
§ 5. - 1. En
sauvegardant les paragraphes 2 et 3 de l'article 6 et l'idée
principale d'autonomie ci-dessus définie (§ 1), rien n'empêche que,
dans l'organisation des Fédérations de monastères, à l'exemple de
plusieurs Congrégations monastiques et d'Ordres, soit de chanoines,
soit de moines, on apporte à cette autonomie d'équitables conditions
et adoucissements qui paraissent nécessaires ou plus utiles.
2. Cependant, les
formes de Fédérations qui paraissent contraires à cette autonomie
dont Nous avons parlé au premier paragraphe de cet article et qui
ressembleraient à un genre de gouvernement central, sont
spécialement réservées au Saint-Siège et ne peuvent être établies
sans une permission expresse de sa part.
§ 6. Les Fédérations de
monastères, en raison de leur origine et de l'autorité dont elles
dépendent directement et par qui elles sont gouvernées, sont de
droit pontifical selon les règles du droit canonique.
§ 7. Le Saint-Siège
pourra exercer sur la Fédération sa surveillance immédiate et son
autorité, comme le cas le comporte, par un assistant religieux dont
la fonction sera non seulement de représenter le Saint-Siège, mais
aussi de favoriser la conservation du véritable esprit particulier à
l'Ordre et d'aider les Supérieures par son activité et son conseil à
gouverner la Fédération dans la justice et la prudence.
§ 8. - 1. Les statuts
de la Fédération doivent s'harmoniser non seulement avec les règles
qui seront établies, en vertu de Notre autorité, par la Sacrée
Congrégation des Religieux, mais encore avec la nature, les lois,
l'esprit, les traditions ascétiques, disciplinaires, juridiques et
apostoliques de chaque Ordre.
2. Le but principal des
Fédérations de monastères est de se prêter mutuellement une aide
fraternelle, non seulement pour entretenir ainsi l'esprit religieux
et la discipline monastique régulière, mais aussi pour favoriser la
situation économique.
3. En cas de besoin, on
donnera, en approuvant les Statuts, des normes particulières pour
réglementer la faculté et l'obligation morale de demander et de se
prêter mutuellement les Moniales qui seraient jugées nécessaires,
soit pour le gouvernement des monastères, soit pour la formation des
novices dans un noviciat commun à établir pour tous les monastères
ou pour plusieurs d'entre eux, soit enfin pour pourvoir aux autres
besoins matériels ou moraux des monastères ou des Moniales.
Art. VIII
§ 1. Le travail
monastique auquel les Moniales de vie contemplative doivent aussi
s'adonner doit être autant que possible conforme à la Règle, aux
Constitutions, aux traditions de chaque Ordre.
§ 2. Ce travail doit
être organisé de telle sorte que, s'ajoutant aux autres sources de
revenus approuvés par l'Église (cc. 547-551, 582) et aux secours
fournis par la Providence, il assure aux Moniales une subsistance
certaine et convenable.
§ 3. - 1. Les
Ordinaires des lieux, les Supérieurs réguliers et les Supérieures
des monastères et des Fédérations sont tenus d'apporter tout leur
soin et leur attention pour que le travail indispensable, convenable
et rémunérateur ne manque jamais aux Moniales.
2. Les Moniales sont,
de leur côté, tenues par obligation de conscience, non seulement à
gagner honnêtement, à la sueur de leur front, le pain dont elles
vivent, selon le conseil de l'Apôtre (II Thess. III, 10),
mais encore à se rendre, comme les temps l'exigent, de jour en jour
plus aptes ou plus habiles pour les divers travaux.
Art. IX
Pour que toutes les
Moniales soient fidèles à leur divine vocation à l'apostolat, elles
ne se contenteront pas seulement d'employer les moyens généraux de
l'apostolat monastique, mais elles veilleront en outre à observer ce
qui suit :
§ 1. Les Moniales qui
ont des oeuvres d'apostolat bien définies dans leurs Constitutions
particulières ou par des prescriptions de la Règle sont tenues de
s'y adonner et de s'y consacrer fidèlement, conformément à leurs
Constitutions ou statuts et à ces prescriptions.
§ 2. Les Moniales qui
professent la vie exclusivement contemplative (nn. 19, 22, 2) :
1. Si, dans leurs
propres traditions, elles admettent ou ont admis une forme spéciale
d'apostolat extérieur, tout en sauvegardant toujours leur vie
contemplative, qu'elles conservent fidèlement, après l'avoir adaptée
aux besoins actuels, cette forme spéciale d'apostolat; si elles
l'ont abandonnée, qu'elles veillent à la reprendre avec soin. S'il y
a quelque doute qui demeure au sujet de l'adaptation, il faut
consulter le Saint-Siège.
2. Par contre, dans le
cas où la vie purement contemplative n'a jamais été jusqu'ici, ni
d'après les Constitutions approuvées, ni d'après les traditions,
unie d'une façon fidèle et constante à l'apostolat extérieur, alors
ce ne sera que dans les cas de nécessité et pour un temps limité que
ces Moniales pourront ou devront du moins par charité s'occuper de
ces formes surtout particulières ou personnelles d'apostolat qui
paraissent compatibles, selon les règles à fixer par le Saint-Siège,
avec la vie contemplative, comme elle est pratiquée dans l'Ordre.
Tous les décrets
contenus dans ces lettres, Nous voulons et ordonnons qu'ils soient
stables, fixes, valables, nonobstant toutes clauses contraires, même
dignes d'une mention très spéciale.
A toutes les copies ou
à tous les extraits, même imprimés, signés cependant de la main d'un
notaire public et munis du sceau d'un dignitaire ecclésiastique,
Nous voulons qu'on accorde la même créance qu'on donnerait aux
présentes si elles étaient présentées ou montrées.
Qu'il ne soit donc
permis à personne d'enfreindre cette page de Notre déclaration et
décision ou, par un téméraire audace, d'y contredire. Si quelqu'un
avait la présomption d'y attenter, qu'il sache qu'il encourrait
l'indignation du Dieu tout-puissant et de ses bienheureux apôtres
Pierre et Paul.
Donné à Rome, près
St-Pierre, le 21 novembre, consacré à la Présentation de la
Bienheureuse Vierge Marie, l'année jubilaire 1950, la douzième de
Notre Pontificat.
PIE XII, PAPE
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