Jeanne Jugan
(1792-1879)

 Fondatrice des Petites Sœurs des Pauvres

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L’esprit des petites Sœurs

 

Jeanne Jugan avait donné à sa jeune congrégation un esprit de pauvreté: les Petites Sœurs devaient vivre pauvrement avec les pauvres, en n’ayant d’autres ressources que la seule générosité des personnes qu’elles allaient quêter. À mesure que les maisons se multipliaient, une question[1]  se posait de plus en plus souvent aux supérieurs: devait-on continuer à vivre, et à faire vivre les vieillards, dans une telle insécurité? En 1865, le comte de Bertou[2], un ami qui s’occupait des affaires des Petites sœurs souleva ce problème: “Vous ne devez posséder que les immeubles que vous habitez, et pour le reste, vivre de la charité quotidienne. Si les Petites Sœurs passaient pour avoir des rentes, elles perdraient leurs droits à cette charité qui faisaient vivre les Israélites dans le désert...”

Que faire? quelle décision prendre? Les avis étaient partagés au sein du Conseil. Les évêques consultés ne savaient que conseiller. C’est alors que quelqu’un eut l’idée de dire: “Et si l’on demandait à Sœur Marie de la Croix ce qu’elle en pense?”

En désespoir de cause, il fut décidé de faire venir Sœur Marie de la Croix, celle que l’on avait oubliée depuis tant d’années...  Très surprise, elle vint et affirma “qu’il fallait continuer à ne pas accepter de revenus fixes et à s’en remettre à Dieu, en toute confiance.” Son avis prévalut. Jeanne signa le document officiel puis regagna son noviciat. Elle se retrouvait de nouveau seule avec son Seigneur. C’était le 19 juin 1865.

L’abbé Le Pailleur ne signa pas ce document officiel.


[1] La question se posa à propos d’un legs important offert sous forme de rentes. Fallait-il accepter cette sécurité?

[2] Cité par Éloi Leclerc, dans Jeanne Jugan, Le Désert et la Rose”. Publié chez Desclée de Brouwer.